Je veux enregistrer mon « Reign In Blood » avec John Bush derrière le micro.
Avec le temps, on a heureusement appris à ne plus prendre les déclarations de Scott Ian au pied de la lettre car, au sortir d'un hiatus forcé de cinq ans causé par deux sévères échecs commerciaux (et artistiques,
« Stomp 442 » et
« Volume 8 » étant loin d'être des chef d'oeuvres), ANTHRAX se trouve, comme on dit dans pareil cas, à la croisée des chemins. Le changement de décennie étant soudain plus propice aux vieilles gloires du thrash que les sombres années 90, on aurait effectivement pu s'attendre à ce que Benante, Bush, Bello et consorts jouent à fond la carte
back to the roots en revenant à leurs premières amours ; après tout, « Bigger Than The Devil » de S.O.D., sorti en 1999, participait clairement de cette démarche. Pour autant, si bouleversements il y a sur ce neuvième full length, ils ne concernent guère que le line-up, l'éternel intérimaire Paul Crook cédant sa place à Rob Cagianno, guitariste et producteur de ILL NINO, BLEEDING THROUGH ou encore CRADLE OF FILTH (sur « Nymphetamine » et « Damnation And A Day »). Assez neutre sur album, le bonhomme ne convainc guère plus sur scène en réduisant les solis de Dan Spitz au strict nécessaire. De mon point de vue donc, on ne peut pas dire qu'ANTHRAX ait réglé la question du guitariste lead, si ce n'est sous forme d'illustres caméos. Pour le reste, pas d'effusions sanglantes à attendre en guise de retrouvailles métalliques, sinon sur l'atypique « Black Dahlia » ou la gentiment bourrine « What Doesn't Die ».
Deux titres un tant soit peu farouches sur quatorze, vous avouerez, ça fait un peu léger pour une filiation avec le mythique troisième album de SLAYER et quand bien même ce cher Scott parlait en termes plus généraux (et de son désir de sortir le meilleur album d'ANTHRAX avec John Bush), il y a une très grosse marge entre un « Reign In Blood » d'anthologie et ce « We've Come For You All » franchement bon dans l'ensemble, mais qui risque fort de décevoir les nostalgiques des
Island Years. Car que ce soit « Black Dahlia », inspirée des écrits de James Ellroy, sorte de reflet tourmenté de « Black Lodge » - sur
« Sound Of White Noise » - qui voit le groupe incorporer des blasts beats dans une compo bien trop courte pour convaincre ou encore « What Doesn't Die », première salve mi thrash, mi néo (faut bien vivre avec son temps), on ne peut pas dire que les titres les plus violents fassent regretter des hits comme « Be All, End All », « Madhouse » ou « Caught In A Mosh ». En guise de réminiscence d'un ANTHRAX adolescent et potache, on se contentera donc d'un clin d'oeil appuyé aux lecteurs de comic books, l'artwork de l'album étant signé Alex Ross.
Ceci étant posé, « We've Come For You All », bien que parasité par une poignée de titres dispensables (« Think About An End » et « Any Place But Here » en tête, sans parler des passe plats « Crash » et « Contact »), est un album agréable et chaleureux, aux influences rock'n roll pour une fois parfaitement digérées, car pleinement assumées (notamment dans le choix de la production, moins froide, très adaptée au contenu). D'obédience principalement mid tempo, l'album contient quelques petits bijous rythmiques où le jeu dynamique de Charlie Benante fait mouche (« Nobody Knows Anything », « Refuse To Be Denied »), quand ce n'est pas Dimebag en personne qui apporte son irrésistible contribution aux savoureuses « Strap It On » - la plus old school du lot comme le chante si bien Bush – et « Cadillac Rock Box », pépite heavy rock au groove diablement enchanteur. Un John Bush une nouvelle fois impeccable, signataires de refrains mémorables et accrocheurs, jamais sirupeux ni putassiers, l'ex-ARMORED SAINT allant même braconner sur les terres du James Hetfield post Black Album sur « Any Place But Here ». Un art éprouvé du refrain catchy qui sauve de la banalité des morceaux un peu mou du genou comme « Taking The Music Back » ou le title track, qui auraient gagnés à sonner plus brut de décoffrage. Deuxième meilleur album du ANTHRAX mark II, « We've Come For You All », astucieusement équilibré entre pseudos ballades (l'efficace « Safe Home », la plus lourdingue « Any Place But Here ») et incursions heavy/pop/rock typiquement ricaines (« Superhero », « Refuse To Be Denied »), manque parfois un peu de mordant et ANTHRAX aurait gagné à resserrer les lignes sur la fin – la version acoustique de « Safe Home » et la reprise des RAMONES ne sont pas bouleversantes - mais le soin particulier apporté aux compositions, pour la plupart très solides (même « Think About An End » est sauvée par un break très plaisant, à l'attention des fans de la vierge de fer) achève de convaincre que les new-yorkais ont encore un semblant d'avenir devant eux. Enfin ça s'était avant que John Bush ne soit mis sur la touche au profit de la paire de revenants Belladonna/Spitz, le temps d'un
reunion tour dont l'intérêt continue de m'échapper. On se consolera à l'écoute de « Greater Of Two Evils », dernier témoignage discographique de l'ère Bush en guettant, sans trop y croire, les premiers pas de Dan Nelson sur un
"Worship Music" qui commence à se faire attendre.
3 COMMENTAIRE(S)
22/06/2009 21:28
16/06/2009 20:45
16/06/2009 17:36
Et puis "Cadillc Rock Box" qu'est ce qu'elle rock! Fuck yeah!