Je me souviens avoir écouté un premier extrait de ce neuvième album studio (« Cold Blooded », de mémoire) sur le sampler d'un magazine spécialisé, ROCK HARD pour ne pas le nommer. Ces derniers ayant pour habitude de balancer tout et n'importe quoi sur leurs galettes, y compris des versions rough mix dégueulasses sous couvert d'exclusivité mondiale, j'avais juste tiqué sur ce son de guitare ultra saturé, limite audible, qui laissait tout de même présager du très bon ANNIHILATOR. Qu'à cela ne tienne, l'album sortirait un mois plus tard dans sa version définitive et ce crachin de décibels hautement désagréable resterait sans suite. Comme dirait Jack Slater, monumentale erreur et une fois « Waking The Fury » entre les oreilles, le cauchemar d'une production très expérimentale (signée Waters) surprend d'autant plus désagréablement que celle du précédent,
« Carnival Diablos », était on ne peut mieux équilibrée. En faisant sonner la guitare rythmique comme celle d'une K7 de « Kill 'em All » passée entre les mains de trois générations de fans, Jeff Waters a eu la main lourde, y compris en faisant revenir le bourrin de service, Randy Black, en lieu et place de Ray Hartmann, parti s'occuper de son fils.
Autre changement notable, moins douloureux celui là, le remplacement de Dave Scott Davis (souffrant du dos) par Curran Murphy, débauché de chez NEVERMORE au cours d'une tournée commune, une habitude après le transfert de Joe Comeau (ex-OVERKILL). A ce compte là, le grand Jeff doit prier pour faire la première partie de SLAYER et leur piquer Dave Lombardo! Pour le reste, et c'est heureux, pas de changements notables, Joe Comeau faisant de la résistance derrière le micro. Une aubaine, tant « Waking The Fury » lui doit une bonne partie de son intérêt. Plus à l'aise que sur
« Carnival Diablos », le frontman chaméléon fait parler la puissance sur un titre vaguement digne d'intérêt (un « Ritual » bien basique, qui ne vaut que pour d'impeccables lignes de chant), soigne son background heavy metal (le superbe refrain de « Torn ») ou se lance dans une brillante imitation de Tom Araya sur le fast track « Cold Blooded ». Très à l'aise également sur l'inévitable tribute song aux idoles de jeunesse de Waters, « Nothing To Me » (sorte de « Shallow Grave » numéro deux), Joe Comeau soigne ses stats et, en grapillant l'écriture d'une partie des paroles, se voyait sans doute comme le co-capitaine au long cours d'un vaisseau canadien ayant essuyé de sacrées tempêtes. Las, big Joe quittera le navire dès le skeud suivant, un live de très bonne facture
(« Double Live Annihilation ») pour d'obscures raisons que ni lui ni Waters n'ont voulu dévoiler jusqu'à présent.
Curran Murphy restant très discret dans toute cette histoire, on notera une sensible évolution vers des compositions plus dynamiques, plus martiales (jeu ultra carré de Randy Black oblige) et directes, parfaites pour le marché allemand. C'est SPV qui a dû être content! Les autres, qui attendaient des canadiens un peu plus de grâce et de subtilité se contenteront de quelques miettes (les arpèges majestueux en introduction de « Nothing To Me »), « Waking The Fury » faisant la part belle aux mid tempos écrasants (la réussie « Prime-Time Killing », les lourdingues « Fire Power » et « The Blackest Day »), heavy thrash speedé (« Striker », qui reprend le thème de
« Never, Neverland ») et thrash metal véloce (« Ultra-Motion », « Cold Blooded », « My Precious Lunatic Asylum »). Bien qu'efficace dans tous les registres abordés, « Waking The Fury » reste un album mineur (mais pas mauvais, c'est déjà ça de pris), plombé par une production indéfendable et sans réélle personnalité, où les éclairs de génie sont rares et l'inspiration à géométrie variable. Préférez donc le double live de 2003, la plupart des titres de « Waking » y étant présents dans des versions de qualité sonore nettement supérieures.
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