Du changement chez ANNIHILATOR! Fatigué d'essuyer des critiques à tout bout de champ pour avoir lamentablement sabordé un des plus gros espoirs heavy thrash de la décennie précédente, Jeff Waters décide de prendre du recul et abandonne les commandes à son fidèle second, Dave Scott Davis, lequel aura la (pas si) lourde tâche de faire oublier les années d'errance musicale post
« Set The World On Fire ». Cantonné à la production mais toujours prompt aux changements arbitraires, mégalo-Jeff entrevoit un futur frontman en la personne de Ray Hartmann, bientôt quarante balais et le dos en compote, qu'il titularise sans crier gare derrière le micro. Et qui pour donner le tempo alors ? Le franc succès commercial de
« Remains » ayant prouvé l'absurdité de faire appel à un véritable batteur, une bonne vieille BAR fera donc l'affaire, gérée par l'ex bassiste Russ Bergquist qui n'y entend absolument rien en programmation. Vous me direz, que vient donc faire Joe Comeau, ex-LIEGE LORD et surtout guitariste chez OVERKILL durant quatre albums (respectivement sur « The Killing Kind », « From The Underground And Below », « Necroshine » et « Coverkill ») dans tout ça ? Couper les tifs de Waters bien sûr, qui du coup ressemble beaucoup moins à une fusion du Christ et de ce demeuré de Stephen Baldwin.
Blague à part, ANNIHILATOR nous revient ici avec un line-up quasiment inchangé, seul Randy Rampage ayant fait les frais d'un remaniement ministériel pour une fois savamment orchestré : vu la piètre performance du vocaliste de
« Alice In Hell » sur le pétard mouillé
« Criteria For A Black Widow », on saluera bien volontiers l'arrivée de Joe Comeau au poste de chanteur, c'est toujours mieux que Frédéric Mitterand et puis au moins, il assurait les backing vocals chez la bande à D.D. Verni, c'est pas comme si on avait confié le poste à un sourd muet. Reste que si ce choix peut paraître curieux de prime abord, Comeau n'étant pas à l'époque identifié comme un chanteur à part entière, il s'avère franchement payant dans la mesure où la versatilité du nouvel arrivant s'accorde parfaitement avec les compositions à géométrie variable de maître Waters, toujours à cheval entre plusieurs chaises musicales, qu'elles soient thrash, rock ou heavy. Mais la meilleure nouvelle dans tout ça, au delà d'un semblant de stabilité retrouvée (rassurez vous, le line-up va imploser dès l'album suivant,
« Waking The Fury »!), c'est que le combo canadien vient ENFIN de sortir un BON ALBUM. Pas un chef d'oeuvre, non, ni un incontournable du genre, juste un BON ALBUM ce qui, vu la somme des talents réunis sous la bannière ANNIHILATOR, devrait suffire à vous faire dresser l'oreille.
Premier constat, le son est vraiment monstrueux et rend enfin justice au savoir faire rythmique du quatuor Waters/Davis/Bergquist/hartmann qui, loin de tirer un trait sur la réorientation thrash de l'album précédent, affine juste ce qu'il faut des titres dans l'ensemble bien plus inspirés que ceux de « Criteria ». Les amateurs de thrash saignant à la sauce mélo trouveront de quoi se repaître dès les trois premiers morceaux, de la percutante opening track « Denied » (au riff coupe gorge irrésistible) à une « Battered » menée de main de maître, en passant par une accélération vengeresse dans la grande tradition du genre à 2:07 sur « The Perfect Virus », le tout avec cet art consommé du riff tranchant dont seul (ou presque) Jeff Waters a le secret. Dans un registre encore plus frontal, impossible de passer sous silence l'ultime offensive de fin d'album, une « Hunter Killer » à l'exécution toute sauf sommaire qui, passé deux minutes à faire monter la pression dans les rangs, s'avère être le titre le plus bourrin jamais composé par ANNIHILATOR. Riffs sombres et oppressants, cavalcades rythmiques et solis ahurrissants de virtuosité, break monumental décollant véritablement à 4:27 avant que le groupe ne lâche à nouveau les chevaux pour un final apocalyptique, tout y est, et jamais plus SLAYER ne recevra si bel hommage.
ANNIHILATOR n'ayant jamais donné dans le tout rapide, on trouvera également sur « Carnival Diablos » une bonne poignée de titres mid tempo plus ou moins radicaux, la palme de la lourdeur échoyant sans peine à l'excellente « Time Bomb », où Joe Comeau paye son tribut heavy à Rob Halford le temps d'un refrain sacrément haut perché. Les plus mélodiques « Epic Of War » et « The Rush », moins véhémentes qu'une « Insomniac » (sûrement la moins intéressante du lot avec l'instru) mettent en évidence les capacités vocales de Joe le temps de quelques screams bien sentis, quand Waters ne vient pas faire son Yngwie en caviardant le refrain d'une orgie de leads ô combien jouissive. A l'aise dans les parties claires (« Epic Of War » à 2:48) comme dans celles, plus agressives, où il donne la cadence sans faiblir, Comeau est assurément la bonne pioche d'un « Carnival Diablos » n'oubliant pas de passer par la case instrumentale (« Liquid Oval », un peu dans la veine de « Catch The Wind ») rock n' roll (« Shallow Grave », du AC/DC typique) ou mélancolique, les sublimes arpèges du title track ramenant à la surface les vestiges du lointain mais inoubliable
« Never, Neverland ». Finalement, le seul tort de cet album - au delà de l'absence de surprises et de classiques indiscutables comme pouvaient l'être « W.T.Y.D. » ou « The Fun Palace » - est d'être sorti un peu trop tard, à l'heure où ANNIHILATOR était déjà mort et enterré aux yeux de tous. D'où, finalement, l'étiquette de seconds couteaux du thrash qui colle à la peau des canadiens, malgré tout leurs efforts pour stabiliser une formule metal aussi diablement séduisante que dramatiquement inconstante.
3 COMMENTAIRE(S)
01/07/2009 09:55
Je suis pas non plus fan des morceaux AC/DC qu'on retrouve sur quasi tous les albums depuis "King Of The Kill"
Je trouve qu'Annihilaltor sonne trop "plastique" depuis cette période. J'ai pas revendu mon cd mais je le ressors pas très souvent.
27/06/2009 12:32
Album à découvrir absolument...
25/06/2009 12:43