Faudrait que j'arrête de chroniquer du My Dying Bride en-veux-tu-en-voilà, je commence être à court de superlatifs pompeux. Non parce que,
Like Gods Of The Sun est mon préféré, c'est entendu, mais
The Light At The End Of The World le talonne de très près à en toucher son trou du cul funéraire avec des airs de outsider visant la première place dans mes oreilles. Pourquoi ? Il est un retournement de veste honteux après un
34,788 %... Complete aux intentions louables d'évolution ! Le contexte cher lecteur…
Ce disque est sorti en 1999. Voilà, ça explique tout. Ça explique l'odeur d'Apocalypse qui le traverse, la production messianique, parfumée, vaporeuse (ah, pas si à court que ça finalement !), tantôt brute comme le musc et fanée comme la vanille. Ça explique « She Is The Dark », noir, noir, noir, africain même tant il est une terre étrangère hostile avec ses larsens de sable dur et un Aaron invoquant la moisson par ondulation, le grave de la sécheresse, la nervosité du vent avant la pluie. Ça explique ces visions faites de voyage à dos de corbeau, pointant de son aile maudite les prémices de la destruction : ici, un fakir s'enfonce une planche à clou dans le crâne à l'écoute des mélodies orientales de « Edenbeast » et son chant de muezzin éploré, la sensation du fer se mêlant aux synapses. Là, un homme contemple le dernier souffle de sa bien-aimée et questionne les nuages - doit-il la venger ? -, doute, abandonne ses croyances et prend plaisir dans le meurtre accompli (« The Night He Died »). Ailleurs, un couple de personnes âgées se tient les mains et se regarde avec nostalgie, il s'est habillé pour le grand jour, se dit heureux de l'affronter ensemble avant que l'angoisse surgisse et le divise, la mort étant affaire d'intimité (« The Light At The End Of The World »). Partout, les eaux grondent, prêtes à engloutir ce qu'il reste d'innocent en une attaque surprenante, aussi définitive qu'un éclair (« The Fever Sea »), les tourbes s'élèvent et asphyxient les gorges de leur larmes boueuses mais avec légèreté, la fin du monde dans un soupir que tu vois d'en haut, accablé (« Into The Lake Of Ghosts »). Et c'est alors que vient ton tour. Le temps de te rendre compte que l'oiseau chevauché est armé d'une lance, trop tard, il te transperce par deux fois avant de marteler ton corps de ses griffes pour finalement jeter ta carcasse agonisante (« Isis Script »). La suite est un vol plané chavirant où la blessure côtoie la paix, des cordes angéliques guidant une chute fluide comme un fleuve, puis comme un torrent, une grâce progressive emportant ton corps jusqu'à ce qu'il ne reste rien, rien, rien, à part un écho hébété, complainte des jours vivants (« Christliar », « Sear Me III »).
Tu espérais peut-être à un étalage de « des fois c'est plus violent mais souvent lent et Aaron il gueule de nouveau, c'est bien, le violon a disparu mais on ne le regrette pas » (ou bien tu t'attendais à rien, après tout, tu auras bientôt oublié cette chronique !). Seulement, c'est bien l'imagination qui est sollicitée sur
The Light At The End Of World. L'impression d'absence de prise de risque, d'austérité, est trompeuse. My Dying Bride a utilisé son savoir-faire pour figurer l'ambiance d'une époque arrivant à son terme, où un groupe composant sur des thèmes tels que le paradis perdu, la prophétie ou le Christ trouve dans ce sentiment d'être au bout du chemin un moyen de transcender ces clichés pour créer une vérité artistique, une légende terrifiante car
crédible et cela sans que les années n'éteignent son effet. Il n'est pas le seul. A cette période est sorti
Times Of Grace de Neurosis. Hé, j'en viendrais presque à excuser les millénaristes…
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