Dargaard - Eternity Rites
Chronique
Dargaard Eternity Rites
Un peu de douceur dans ce monde de brutes. Même pour les plus violents d'entre nous (en apparence), difficile de le nier, mais nous avons tous notre période de musiques apaisantes, allongé dans l'herbe, somnolant dans les transports ou le soir chez soi après une journée éprouvante. Ce premier album de Dargaard (forteresse dans « Lancedragon »), Eternity Rites est un pur bijou du genre. Le groupe se forme en 1997, la figure imposante du black metal autrichien, à savoir Sang-Drax Tharen (l'un des fondateurs d'Abigor) en est le géniteur. Le bonhomme suit les traces de son compatriote Silenius, parti s'évader de Summoning et d'Abigor au côté de Protector pour créer Die Verbannten Kinder Evas. Dargaard met ainsi en avant ses talents aux claviers et dans le travail d'ambiance, bercé par les prémices de Dead Can Dance (à l'instar d'un Arcana ou d'un Autumn Tears), cette vague des années 80 qualifiée de darkwave (ou ethereal wave). Tharen recrutera un an plus tard la soprano allemande Elisabeth Toriser qui apparaissait déjà sur le mythique Nachthymnen d'Abigor. Dargaard signera alors chez Draenor, sous label de Napalm Records, afin de sortir sa pierre angulaire Eternity Rites.
Contrairement à la thématique presque « funeral » de Die Verbannten Kinder Evas (que l'on compare beaucoup) ou d'autres, en plus d'une base sombre, Dargaard joue de façon très ancrée sur les territoires du moyen-âge, de la fantaisie (Tharen s'inspire nettement de « Donjons et Dragons ») ou encore de la nature. Un voyage mélancolique et mystique à travers forêts luxuriantes et plaines jonchées de ruines de châteaux forts. L'atmosphère médiévale est tout simplement bluffante (« Fuer Grissa Est Dranka » est à inscrire dans les annales). Clairement l'album qui vous pousse à rejouer à un épisode d'Elder Scrolls (le chef d'œuvre Oblivion par exemple) ou à revoir l'extraordinaire saison une de Game Of Thrones (« Winter is coming »). Oubliez les clichés gothiques « gnangnan » abhorrés par la majorité (sauf Dead peut-être), Elisabeth, telle une Lisa Gerrard (Dead Can Dance), vous berce de ses vers gorgés de tristesse et d'innocence. Au fil de la discographie, elle s'imposera d'avantage au sein de Dargaard. Ici son chant angélique ne fait que soutenir le sublime travail de Tharen. Ce dernier posera d'ailleurs son chant black (« Down to the Halls of the Blind » et « Of Broken Stones ») ou ses murmures discrets sur quelques passages. Tharen reste le centre de ce Eternity Rites. Ne cherchez pas quelconques instruments acoustiques, seul un clavier est présent : des nappes voluptueuses ornées de divers effets ambiants (« Eternity Rites (Part I) » et « Nightvision » en tête). Difficile à croire lorsqu'on écoute attentivement les innombrables instrumentations différentes. Un clavier éthéré (la planante « Eternity Rites (Part II) » ou la magnifique et frissonnante « Seelenlos ») paraissant d'ailleurs beaucoup moins « kitsch » que les notes d'un Protector (défaut aussi relevé dans Summoning) même dans ce côté « épique » commun (« Temples Of The Moon » et « Of Broken Stones »). Si certains groupes de ce genre ont du mal à tenir notre attention sur la longueur (« soporifique » diront certains), la richesse des compositions et les innombrables moments forts d'Eternity Rites sauront vous enivrer pendant plus de 45 minutes. Une fluidité remarquable qui ne laisse place à aucune baisse de régime, le charme est total.
Tharen n'a rien à envier à ses camarades Silenius et Protector, Eternity Rites est un périple des plus touchants à travers de splendides paysages de l'époque médiévale. Une atmosphère triste grandiose soutenue par une richesse et une qualité des compositions impressionnantes. J'avais longtemps hésité à chroniquer cet album car je reste plutôt novice dans le domaine… Mais cette galette me tenait à cœur (je la ressors très souvent), la plus sombre et émouvante de la discographie de Dargaard. Un de mes albums de chevet.
| Mitch 23 Juin 2011 - 2765 lectures |
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