Alors ça y est, c’est l’heure des comptes ? C’en serait terminé de l’aventure MEGADETH avec cet ultime témoignage discographique sobrement intitulé « Th1rt3en », illustré par ce bon vieux Vic nous tournant le dos avant de s’en retourner vers la tombe ? Oui, si l’on en croit les déclarations de Dave Mustaine himself quelques semaines avant la sortie d’un
« Endgame » qui avait le mérite d’annoncer la couleur. Car dernier album ou pas, il est désormais acquis que l’impétueux rouquin tire là quelques-unes de ses dernières cartouches avec un opus regroupant nouvelles compos et matériel plus daté, comme en témoignent ces deux rescapées des sessions d’enregistrement de
« Countdown To Extinction » (1992), « New World Order » et « Millenium Of The Blind ».
Où réapparaissent les noms de Marty Friedman et Dave Ellefson pour un contenu délaissant quelque peu la furia speed de l’effort précédent au profit de morceaux plus mid tempo, dans la veine de ce que le groupe proposait dans la première partie des années 90. Marty Friedman ? J’en vois qui grimpent déjà aux rideaux … non, la fine lame de l’âge d’or de MEGADETH n’a pas réintégré la mère patrie et c’est toujours Chris Broderick qui suppléé Mustaine à la six cordes. Dave Ellefson par contre, absent depuis le live « Rude Awakening », signe donc son retour sur un « Th1rt3en » qui lui va comme un gant compte tenu du caractère groovy de la plupart des titres. On évacue les défauts vite fait histoire de poursuivre en mode convivial, entre vieux fans de la première heure ravis de voir les faux jumeaux cohabiter à nouveau sur une même galette ? Alors entamons les hostilités avec un Chris Broderick tout feu tout flamme sur
« Endgame », curieusement bien moins concerné ici, et qui est loin de faire oublier les prestations de Marty Friedman, Chris Poland ou même Jeff Young sur les productions antérieures. Pas de quoi crier au scandale non plus, l’essentiel est assuré mais il subsiste une désagréable impression de leads génériques, de déjà entendu malgré la surenchère habituelle en la matière sur l’opener « Sudden Death ». Deuxième reproche, on ne trouve sur « Th1rt3en » aucun titre irrésistible du calibre de « Blackmail The Universe », « You’re Dead » ou encore « This Day We Fight ! », pour ne citer que les meilleurs de la période récente, défaut heureusement contrebalancé par un niveau de jeu moyen suffisamment élevé pour qu’on écoute ce treizième full length d’une traite, avec la tentation évidente de remettre le couvert. Le côté patchwork de l’opus peut également prêter le flanc à la critique (« Sudden Death » et « Never Dead » proviennent des jeux vidéos Guitar Hero et NeverDead et pour le reste, le père Mustaine a fait chauffer le disque dur avec pas mal de démos remises au goût du jour) même si une fois n’est pas coutume, un bon titre + un bon titre + un bon titre = un bon album. Tout juste regrettera-t-on l’absence de direction artistique plus marquée mais l’heure est-elle vraiment à la prise de risques ? Enfin, concernant les carences speed évidentes comparé à
« Endgame », on trouve quand même de quoi se sustenter avec une bonne moitié de « Sudden Death », le dernier tiers de « New World Order », les salves de double pédale de « Never Dead » et les punkisantes « Fast Lane »/« Whose Life (Is It Anyways ? »).
Mais l’essentiel est ailleurs et il y a fort à parier que les fans de
« Countdown To Extinction » et
« Youthanasia » seront aux anges, tant MEGADETH renoue avec une certaine idée du riff qui plombe, à l’ancienne, sans délaisser l’aspect mélodique des choses. Car si l’on perd un peu en flambe pure, la bonne nouvelle c’est que Dave Mustaine s’est remis à chanter ! Fini les grognements monocordes de
« Endgame », c’est le grand retour des refrains fédérateurs à siffler sous la douche (« Public Enemy N°1 », « Black Swan », « We The People ») et la fête des cervicales avec un concentré de thrash n’ roll façon « Play For Blood » qui fait mouche (« Guns, Drugs & Money », « New World Order », « We The People »). Un petit clin d’œil à « Lucretia » plus tard, on hérite même d’une relecture d’un certain « Enter Sandman » (« Deadly Nightshade ») à la sauce Deth, Mustaine s’offrant une fin de programme plus émotionnelle avec la rampante « Millenium Of The Blind » et un title track soulignant la fin programmée d’un monstre sacré du metal. Par ailleurs, les nombreuses réminiscences savamment distillées d’un titre à l’autre feront frissonner de plaisir les nombreux partisans de
« Rust In Peace » (les duels frénétiques entre Mustaine et Broderick sur « Sudden Death »),
« Countdown To Extinction » (« We The People » et sa complainte déchirante à mi-parcours, qui n’est pas sans rappeler « Sweating Bullets ») et
« Youthanasia » (le refrain ultra léché de « Black Swan », une petite merveille), quand MEGADETH n’y va pas de sa relecture Priestienne sur le démarrage de démolisseurs heavy metal de « Fast Lane », façon « Judas Rising » !
Voilà donc un album certes moins impressionnant que les trois précédents (la barre était haute, soyons clairs) mais à la fois moins inégal et plus varié que ses devanciers, et qui aurait à coup sûr cartonné s’il était sorti après
« Youthanasia », voire en lieu et place du faiblard
« The World Needs A Hero ». Même des titres sans réelle envergure comme "Wrecker" n'entament en rien le plaisir d'écoute et il s'en faut de peu pour que "Th1rt3en" ne figure parmi les meilleures productions du groupe. En l’état, MEGADETH s’offre avec « Th1rt3en » une quatrième bonne pioche d’affilée ainsi qu’une porte de sortie plus qu’honorable : si cet album doit marquer la fin de carrière d'un géant du heavy thrash, il n’y aura pas à crier tant Mustaine a redressé la barre de main de maître depuis les errances de la période 1999-2004 mais on prie tout de même pour un dernier rappel avec, pourquoi pas, une flopée de guest-stars bien riffues (Glen Droven, Marty Friedman et même Jeff Waters tiens !) pour sabrer le champagne en compagnie d'un des plus grands songwriters de sa génération.
2 COMMENTAIRE(S)
22/11/2011 07:54
21/11/2011 11:30
Sinon je suis d'accord avec toi, un album moins speed qu' "Endgame" mais au final je le trouve plus intéressant, plus ambiancé et j'ai plus facilement envie de me le remettre une fois fini. Des titres plus mid tempo mais avec de très bon refrains ("Public enemy n°1", "Black Swan", "Whose life"...). Effectivement un album qui n'aurait pas fait tache après "Youthanasia" et bourré de clins d'oeil à l'époque "CTE"/"Youthanasia" voire "Rust".
J'espère évidemment que ce ne sera pas dernier mais en tout cas chapeau Mr Mustaine, un sacré songwriter ouais!
edit: Ah oui, moi j'aime beaucoup "Wrecker"! Très accrocheuse. Une de mes préférées!