Libérés. Voilà ce que donnent l'impression d'être les Français de Sofy Major sur
Waste, troisième album succédant à
Permission to Engage et
Idolize. Ne connaissant pas les causes de ce sentiment, je ne m'avancerai pas sur le sujet – on peut tout de même suggérer que ne pas voir une tornade détruire le studio dans lequel on enregistre (comme cela a été le cas pour
Idolize) a dû favoriser une détente des esprits. Toujours est-il que cette cuvée 2015 est celle du plaisir avant tout, abandonnant les quelques expérimentations parfois absconses dont aimait user la bande toujours menée par Mathieu Moulin, dirigeant du label Solar Flare.
Enregistré à la maison (le Black Box Studio situé en France) et en famille (Dave Curran de Pigs et Unsane aux manettes),
Waste donne à entendre un Sofy Major à l'aise, assuré dans sa croisade au service du noise rock, tout en donnant à sa fiche de synthèse ce qu'il faut de personnalité propre, à cheval entre le hardcore et le stoner. Non, le groupe ne s'est toujours pas mis à l'ambiant ou la folk, mais a développé ce sens du groove accrocheur sur ses huit nouvelles compositions. Les premiers titres déroulant leurs riffs nés pour faire bouger les têtes en concert jusqu'à la bien-nommée « Turning Point » ne laissent aucun doute sur la question : ici se vénèrent les récréations de camionneurs buvant leurs bières au grand air, sans prétention à la profondeur ou l'ambiance nuancée.
Une absence de prise de tête qui, un peu à la manière de ce qu'a regretté mon collègue AxGxB envers
Wronger de Pigs, laisse au départ un goût de déception en bouche,
Waste ne marquant pas d'emblée, ni par ses mélodies, ni par ses atmosphères. Traîtreux malgré son allure catchy, il demande un petit temps – et pour être honnête, un peu de volonté par moments (pas facile de rester attentif durant toute la durée de « Black and Table ») – pour révéler son potentiel. L'ensemble finit par convaincre, par petites touches (le refrain entêtant de « Slow Everywhere », la guitare ouvrant le morceau-titre), puis sur sa totalité, marqué que l'on est par des morceaux taillés au millimètre (« Devotion Man » notamment). Derrière son image de bourru à casquette EyeHateGod, Sofy Major a toujours caché une face d'orfèvre, donnant une construction particulière à ses œuvres et ce qui les constitue : c'est clairement ce point fort qui ressort ici, l'écoute finissant par se révéler agréable en toute occasion, offrant la satisfaction d'un disque faisant du neuf avec l'ancien, sans ambitionner autre chose.
Assurément,
Waste est loin d'être un déchet et je suis désolé mais je n'ai pas pu m'empêcher de faire la blague. Il a pour principal défaut de se terminer par une reprise tuante de « As Happy As » de la formation française Les Thugs où les envies pop parsemées durant trente minutes explosent et font rêver d'un disque uniquement de cet acabit. Si Sofy Major se montre à la hauteur des attentes qu'on est en droit d'avoir à l'écoute d'un troisième longue-durée, il demande encore trop une certaine endurance lors de quelques passages à vide pour dépasser le stade du « bon groupe, faisant un bon album ». Ce qui suffit tout de même amplement pour prendre son pied en compagnie des Français le temps de
Waste !
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