Horloge britannique à la régularité suisse annonçant le Jugement Dernier depuis sa formation en 1999, le duo misanthrope Anaal Nathrakh continue de dégobiller son Necro Black Metal, délicieux mélange corrosif de brutal black et de grind mais à la fibre mélodique toujours plus imposante. Ainsi place en toute logique (deux ans jour pour jour après
Desideratum) à leur neuvième (!) album (tous évidemment chroniqués sur votre webzine préféré)
The Whole Of The Law, deuxième opus sous l’étendard Metal Blade. Comme un air de « déjà vu » pour l’artwork ? La peinture de William-Adolphe Bouguereau (« Dante et Virgile », visible au musée d’Orsay) aura été effectivement déjà utilisée dans la sphère metal, Gorgoroth étant le plus connu (
Ad Majorem Sathanas Gloriam). Présage d’un ensemble à l’arrière-goût de « réchauffé » ?
Après
Domine Non Es Dignus (et plus précisément
Eschaton, achèvement de leur style actuel à mon sens), Anaal Nathrakh usera sa recette black/grind imparable jusqu’à la moelle en ne faisant qu’ajuster sa dose d’accroche/brutalité et en y incorporant de timides éléments électro. Seul
Passion sortira légèrement du cadre habituel mais peinera à convaincre malgré quelques expérimentations attrayantes.
The Whole Of The Law réajuste cette fois l’agressivité après un très (trop ?) mélodique
Desideratum (album le plus accessible de leur discographie à ce jour) au mixage bien trop inégal. Désormais les hurlements de V.I.T .R.I.O.L ne sont plus masqués pour les déluges de la B.A.R, des riffs ou encore des samples. Conséquence, la musique gagne exponentiellement en intensité, les vocaux multicouches du gaillard sont toujours aussi inhumains («… So We Can Die Happy ») et réduiront de nouveau bon nombre de tympans en bouillie. Indubitablement l’un des meilleurs vocalistes de la scène extrême (je me répète). Une ultra-violence que l’on n’avait pas entendue autant sur la durée depuis longtemps… Pour dire, presque aussi éprouvant qu’un
The Codex Necro surtout lorsque le duo évite quelconque mélodie trop sucrée ou refrain chant clair : «… So We Can Die Happy », « And You Will Beg for Our Secrets » (et ce riff à 2:18 !), le break de « Extravaganza!» à 2:18 ou l’intro de « On Being A Slave ». Balance parfaite donc cette fois-ci ?
La première écoute sera plutôt enthousiasmante, le début d’album qu’avait déjà dévoilé en partie le groupe rallie à leur cause nihiliste : le trio « Depravity Favours the Bold » (intro démentielle pour finalement retomber sur un refrain un peu « light »), « Hold Your Children Close and Pray for Oblivion » et « We Will Fucking Kill You » (refrains méchamment « catchy » cette fois) comme exemple parfait de la machine infernale Anaal Nathrakh. Puis les morceaux défilent et l’on relance la galette, une baffe sonore c’est incontestable mais en penchant l’oreille plus attentivement mon constat se mue. Certes cela défouraille et reste carré au possible, mais rien de mémorable ne s’en dégage réellement. Quid des passages malsains et poisseux ? Quid des breaks impromptus tsunami ? Quid des mélodies noires entêtantes ou des refrains enchanteurs ? Aucun hit à l’horizon. Oui certains passages (cités plus haut) valent le détour, particulièrement le morceau final touchant « Of Horror, And The Black Shawls », mais globalement les titres paraissent composés par un générateur de riffs puisant dans leur disco et dans un schéma trop binaire : « In Flagrante Delicto » (refrain assez horripilant), « On Being A Slave » et « The Great Spectactor » font clairement office de chutes studio. Les délires heavy grand guignolesques de « Extravaganza! » ou le discret moment post-black (tremolo sous effet « delay ») sur «… So We Can Die Happy » (2:05) n’arriveront pas à gommer ce sentiment facile et prévisible.
Anaal Nathrakh reprend ce qu’il avait laissé sur l’affuté
Desideratum, il attise sa brutalité et ajuste le mixage ainsi que les effets électro. Problème, l’efficacité en moins. Outre l’inspiration amoindrie aux riffs réchauffés dans une construction majoritairement simpliste (couplet brutal / refrain chant clair / pont mélodique) l’agressivité palpable n’a pas l’impact antérieur, encore trop proprette ici. Rien ne se dégage et pousse à la réécoute. Alors certes pour les néophytes ou ceux suivant Anaal Nathrakh par intermittence,
The Whole Of The Law conviendra à leur instant « Armageddon » mais après déjà neuf chroniques du groupe je ne suis pour ma part nullement repu.
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