D’habitude enclin à nous dispenser quelques menues sorties (essentiellement des splits) histoire de nous faire patienter entre deux albums, Embrace Of Thorns s’est cette fois-ci montré d’une discrétion surprenante pour ne pas dire inquiétante. Près de quatre années séparent ainsi l’excellent
Darkness Impenetrable de son successeur et cela sans que les Grecs ne se soient manifestés une seule fois durant ce laps de temps. Intitulé
Scorn Aesthetics, ce cinquième album sorti l’été dernier sur Iron Bonehead Productions aurait pu être une bonne surprise mais malheureusement celui-ci n’a pas eu sur ma petite personne l’effet tout à fait escompté.
Tout s’abord il faut dire que je n’ai pas été particulièrement touché par l’artwork de Mattias Frisk (Ghoulgotha, Maim, Miasmal, Vanhelgd...). Je ne remets pas ici en cause ses talents d’illustrateur mais sa représentation revisitée du mythe de Prométhée ne me parle absolument pas alors que d’une manière générale je trouve pourtant ses travaux plutôt réussis. Evidemment je ne suis pas du genre à m’arrêter à ce genre de détails (malgré l’importance que je peux y accorder) mais cela m’a tout de même laissé sur une mauvaise impression avant même d’avoir enclenché une seule écoute de ce nouvel album. Une mauvaise impression qui ne va faire que perdurer pendant ces quarante-deux minutes dont je ne retiens pas grand-chose et sur lesquelles je n’ai jamais spécialement envie de revenir.
Formé à la fin des années 90, Embrace Of Thorns n’a jamais baigné dans l’esthétisme soignée des productions plus récentes. Prenez par exemple les artworks de ses trois premiers albums, tous renvoient l’image d’un groupe pratiquant une musique des plus sales, blasphématoires et suffocantes (celle de Chris moyen pour
Atonement Ritual par exemple). Même le travail moins chargé d’Alexander L. Brown suggérait encore un peu de cette idée. Or ici le travail de Mattias Frisk est à l’image de ce que l’on trouve sur ce
Scorn Aesthetics, un Black/Death beaucoup plus esthétique (ces courtes introductions sur fond de musique baroque sur "The Wanderer And His Shadow" et "Scorn Aesthetics"), aux bords arrondis et rendu beaucoup plus facile d’accès grâce à une production d’une propreté à faire pâlir n’importe quel maniaque de la serpillière. Certes, le groupe ne fait que poursuivre un virage entamé depuis l’album précédent (et déjà décrié à l’époque par certains pour sa production nettement plus léchée) mais pour autant le changement de cap n’en est pas moins flagrant (le titre "Scorn Aesthetics" est d’ailleurs probablement l’un des plus parlants). Un choix qui naturellement n’est pas sans avoir des conséquences sur la portée des atmosphères désormais bien moins étouffantes que par le passé... On ressort ainsi de ses écoutes beaucoup moins fatigué et impressionné qu’on ne l’était après celles d’un disque tel que
Praying For Absolution autrement plus exigeant.
Bien qu’il ne manque ni d’intensité ni d’efficacité grâce à ce rythme toujours très soutenu,
Scorn Aesthetics est l’album d’un groupe qui a décidé de revoir sa copie en profondeur. Alors il y a bien eu entre temps un léger remaniement de line-up (l’arrivée en 2015 de John Votsis, batteur de Dephosphorus, Ectoplasma et Disharmony) mais celui-ci n’explique en rien ces choix. Car outre cette histoire de production évoquée un peu plus haut, on remarque également qu’Embrace Of Thorns a décidé de mettre également l’accent sur les mélodies à travers notamment de nombreux leads voir quelques soli beaucoup plus lumineux qu’auparavant ("The Wanderer And His Shadow" à 2:52, le début de "Reducto Ad Absurdum", "Scorn Aesthetics" à 5:04, "In Our Image, After Our Likeness" à 5:59). La crasse d’autrefois a laissé la place à des moments de grâce beaucoup plus subtils, chargés d’émotions et de sentiments nouveaux que jamais encore nous n’avions ressenti à l’écoute d’un album d’Embrace Of Thorns (cette espèce de splendeur décadente).
Pour autant, la transformation n’est pas non plus des plus radicales puisque les Grecs continuent d’officier dans un Black/Death assez redoutable marqué le plus clair du temps par des passages particulièrement soutenus. Une base rythmique explosive sur fond de blasts et autres cavalcades diaboliques, de riffs sombres et menaçants et de hurlements blasphématoires.
Cependant, si ces quelques éléments permettent de raccrocher naturellement les wagons entre ce que font les Grecs aujourd’hui et ce qu’ils faisaient auparavant, c’est bien un sentiment de déception qui pointe le bout de son nez à la suite de ce cinquième album. Et s’il faudrait être sourd pour ne pas reconnaître le talent d’Embrace Of Thorns dans sa musique et son interprétation, cette version 2018 beaucoup plus grandiloquente mais aussi plus lisse ne me convient guère. Les Grecs ont ici perdu ce côté abrasif, sale et suffocant qui faisait leur charme et aussi une partie de leur singularité au profit d’une musique peut-être beaucoup plus imposante mais en tout cas bien moins terrifiante.
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