Pénalisée par son format, coincé entre
Monumental Possession et
666 International,
Satanic Art n'est pas la première réalisation qui vient en tête lorsqu'il est question de Dødheimsgard. Pourtant cela serait un tort de ne voir en cette sortie qu'une œuvre de transition. Le passage entre un black metal satanique sans fioritures, assez classique de prime abord, et celui plus avant-gardiste développé par le groupe – qui fera sa renommée. Cet EP est quelque peu à part, détenant un charme indéniable. Charme qui a agit encore et toujours sur moi malgré les années passées. Sorti en 1998 via Moonfog Productions, ce dernier était difficilement trouvable et/ou abordable fût un temps (j'avais mis la main sur un bootleg vinyle mexicain...) jusqu'à ce que Peaceville Records n'ait l'excellente idée de rééditer le back catalogue de cette formation culte. L'occasion de replonger dans l'antre de la folie pour les uns ou d'y être initiés pour les autres.
« Touched by the devilish one »
Poursuivant leur route sur le chemin de la connaissance, leurs visages tournés vers Lui, les Norvégiens se défont de leurs chaînes. Ils s'affranchissent des codes et des limites afin de laisser libre court à leur imagination et à Son esprit. En résulte une œuvre aussi noire que conceptuelle, traversée par les personnalités et les goûts singuliers des musiciens. Ce court format est un véritable patchwork d'influences, à l'image de l'artwork, où se côtoient différents arts (allant jusqu'à intégrer la pop culture). Tout comme la série dont sont extraits les samples (Twin Peaks),
Satanic Art déploie moults images et symboles. La formation veut éveiller les consciences à sa manière, jouant avec les matières, électrisant les sens et distordant la réalité elle-même. Le monument « Traces of Reality » en est d'ailleurs la parfaite illustration. Ça explose dans tous les sens avec des effets savamment placés, des notes de violon – tenu par Stine Lunde – instaurant un climat anxiogène, la démence portée bien haut par Aldrahn (totalement investi et possédé au chant), des explosions de violence implacables mises en relief par un son – très indus – tant froid que clinique (mais gardant un aspect rugueux) ou encore ses claviers en mode « grandeur et décadence ». Le groupe déroule l'attirail, avec un bon sens de la théâtralité en prime, pour vous en mettre plein la vue sans perdre en cohérence.
« Reality - larger than mans illusions
or is it me? »
Rhâââ ! « Oneiroscope » ! Introduction instrumentale phénoménale jouée par Svein Egil Hatlevik (Fleurety, Stagnant Waters) et dont l'outro « Wrapped in Plastic » en est l'écho. Une touche plus classique, inspirée par Erik Satie, épurée, addictive mais au bon relent psychotique – que l'on retrouve également sur certains titres. « Psychotique », ce mot pourrait d'ailleurs résumer
Satanic Art à lui-seul. Vous avez toujours le sentiment d'être sur le fil que ce soit par le jeu des musiciens (lignes de violon dissonants, mélodies au piano qui semblent se désarticuler au fil des minutes, riffs épileptiques) ou les nombreuses cassures de rythme vous prenant au dépourvu. Ce glissement vers « autre chose » est accentué par la voix habitée et souvent inhumaine d'Aldrahn (« Symptom » notamment), les samples dérangeants ainsi que les atmosphères grandiloquentes tout droit sorties d'un esprit dérangé. Des sophistications qui sèment davantage le trouble mais qui apportent aussi plus de corps à l'ensemble, offrant un beau contraste avec les passages pilonnant à tout va comme sur « Traces of Reality » et la piste plus traditionnelle qu'est « The Paramount Empire ». C'est un chaos flamboyant et démentiel dans lequel Dødheimsgard vous convie durant ces 16 petites minutes.
Certes, c'est court – la réédition vous permet néanmoins de prolonger quelque peu votre immersion avec deux morceaux bonus (le premier est une version alternative de « Symptom », présente dans la compilation
The Rape Of The Holy Trinity), le second « Black Treasure » est un inédit enregistré dans les années 90. Certaines compositions sont moins marquantes (je pense ici à la dernière citée plus haut) mais bien loin d'être mauvaises et le son est assez raw. Mais c'est justement cette crasse couplée aux éléments plus modernes, aux différents effets et aux instruments classiques qui font le charme de cette œuvre. Plus le line up fantastique (avec Vicotnik, Galder ou encore Apollyon), plus ce mur du son austère à souhait, plus ses ambiances totalement folles. Oui, cette chronique est dithyrambique mais je considère ce court format comme culte.
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