Severoth - Vsesvit
Chronique
Severoth Vsesvit
La perfection n’est pas de ce monde, et pourtant cet album est parfait. Pour plusieurs raisons. Avant tout parce que le concept de la perfection est objectif. Tu vas trouver que tel album est parfait, mais il l’est uniquement pour toi et éventuellement quelques autres zigotos, mais tu auras obligatoirement et heureusement des détracteurs, qui viendront mesurer ton engouement. Ensuite, je pourrais souligner avec une petite pointe d’humour que si la perfection n’est pas de ce monde, cela tombe bien, puisque SEVEROTH est un groupe qui vient d’une autre planète, et nous transporte vers d’autres lieux que notre terre chérie.
5 albums pourtant que ça dure. Depuis 2015 le groupe ukrainien a trouvé les sons, les ambiances qui touchent mes cordes sensibles, et la lassitude ne pointe pas le bout de son nez. Au contraire, je n’ai jamais eu envie de mettre une note aussi haute pour le one mans band. Est-ce que cela siginifie que Квінтесенція (ou Vsesvit selon les sources, apparemment les deux noms d’albums ont été donnés...) est meilleur que ses 4 prédécesseurs ? Eh bien non. Ça ne veut pas dire ça. Parce qu’en fait l’énorme qualité de cette nouvelle offrande, composée de 5 pistes, c’est de faire oublier tout ce qui a existé. Les 64 minutes de jeu nous happent complètement, et plus rien n’existe. Le temps, l’espace, la durée, les dimensions, les couleurs, les odeurs... tout se mélange quand on écoute cet album, tout devient d’une légèreté magnifique.
La perfection de l’album. C’est à dire que d’un bout à l’autre on est convaincu. Mais la première piste joue un grand rôle dans notre voyage. C’est sur elle que reposait la responsabilité de planter un décor. Et elle est magique. Elle est d’un niveau tellement haut qu’aucun mot ne peut correspondre à sa présentation. Elle a tué tous les superlatifs. Son nom ? « Вище неба » ! La traduction ? « Plus haut que le ciel ». Bien évidemment. C’est exactement ce qu’on ressentait à son écoute, elle qui commence par un décor terrestre pour peu à peu nous emmener haut, très haut. Que dire... Elle est composée d’une introduction instrumentale de presque 5 minutes. Habituellement je déteste les longs passages sans vocaux car je m’en lasse rapidement. Eh bien là... pfffff, je peux réécouter en boucle tellement c’est réussi. J’ai même constaté que c’était 5 minutes en préparant ma chro, j’aurais dit deux fois moins !!! C’est du clavier qui navigue entre le brumeux et le spatial. C’est un cor de chasse qui retentit au début. C’est aussi un passage plus traditionnel qui rappelle KRODA... C’est au final le décollage tranquille pépère mais majestueux de notre monde vers les cieux. Les forêts sont là, d’abord autour de nous, puis juste sous nos pieds, et enfin elles deviennent des petits points sombres et juste un souvenir qui reste gravé dans notre mémoire. Ce n’est pas notre vie qui défile devant nos yeux en 5 minutes, ce n’est pas non plus l’existence humaine. C’est l’existence terrestre. Et alors retentissent les vocaux, qui d’un timbre torturé replacent subitement l’homme dans la scène qui se joue. Mais il n’est pas physique, il n’est que poussière et regards, comme s’ils étaient les échos du passé. Et alors qu’on est déjà totalement embarqué par les ambiances et que l’on aurait su se contenter de cette déjà quasi-perfection, ce sont subitement des vocaux clairs qui apparaissent. Mais pas les vocaux clairs qui te font rouspéter. Ceux qui te font dresser les poils. Ceux qui étaient censés tout gâcher, mais qui au contraire allument d’autres étoiles.
On sait que cela sera dur de maintenir un tel niveau sur la suite de l’album, et pourtant. Sans jamais refaire appel au cor ou aux ambiances de KRODA, les quatre autres morceaux sont eux aussi merveilleux. Le décollage a été fait, et ils sont bien plus ancrés dans les hauteurs, sachant chacun avec un dosage particulier allier les ambiances spatiales à la mélancolie. On dirait presque que c’est du « dépressif des étoiles » quand on écoute « Попереду, нарешті, порожнеча» (Devant, enfin, le vide). On n’a pas envie d’utiliser le mot qui suit mais c’est tellement celui qui vient en tête qu’on n’a pas vraiment le choix... C’est beau. Et parfois une petite replongée vers la Terre permet aussi de reprendre une bouffée d'oxygène, comme l'introduction de «Срібні Зорі Весни » sur laquelle on entend déclamations et cris de corbeau.
J’ai succombé à tout l’album. SEVEROTH est véritablement l’un des groupes actuels qui me touchent le plus. Le genre qui squatte les oreilles longtemps, et qui fait même oublier que vous avez encore beaucoup d’autres groupes à écouter. Le genre à vous faire prendre du retard dans la découverte de la scène black metal. Le genre surtout à vous convaincre qu’il y a encore la possibilité de ressentir ce genre de choses malgré les années. L’album parfait, pour Sakrifiss en tout cas... Et comme toujours dans ces cas-là un 9.5 en attendant de voir si le temps ne change rien à l'affaire et que le 10 serait alors atteignable...
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