Vous avez remarqué? CARCASS est devenu METALLICA. Un hiatus de 8 ans entre
« Surgical Steel » et « Torn Arteries », soit un rythme de sénateurs capitalisant pépère sur leur statut de vieilles gloires responsables de pierres angulaires identifiées depuis Mathusalem,
« Reek Of Putrefaction » et
« Heartwork » en tête. Bien sûr, Bill Steer et Jeff Walker n’ont pas engrangé autant de biftons que Lars, James et consorts et cette comparaison un peu osée ne tient la corde que sur des questions d’enjeux et de temporalité. Encore que ! En interview, Jeff y allait de lui-même sur cette mise en parallèle, détaillant un mode de fonctionnement particulier entre deux personnalités concédant ce qu’il fallait pour le bien commun, à savoir une musique de qualité supérieure. Bill Steer vs Jeff Walker donc, Tom Draper (guitare, live session) et Daniel Wilding (batterie) remettant le couvert pour seconder le fameux binôme.
Alors que vaut ce « Torn Arteries » et son délicieux artwork faussement vegan, si révélateur de ce qui vous attend à l’intérieur de ce seulement septième album studio ? Dans la continuité d’un
« Surgical Steel » mais surtout du récent EP
« Despicable », CARCASS nous revient en bonne forme, jouant avec malice avec les codes d’un genre qu’il a largement contribué à créer et populariser. Certes, le blast n’est plus omniprésent dans leurs compos et ce depuis belle lurette, les Anglais usant désormais du procédé rythmique comme d’un jump scare dans une production horrifique, à l’instar des diverses accélérations relançant la machine « Torn Arteries » à la manière d’un défibrillateur. La rapidité d’exécution n’est pas le propos ici, ce nouvel album pouvant schématiquement s’inscrire dans une logique de greffe astucieuse entre
« Swansong » et « Necroticism – Descanting The Insalubrious », pas franchement deux monstres d’intensité par rapport à
« Heartwork » ou aux débuts goregrind cradingues ; ici, la tentation mid tempo et les œillades au heavy des années 70/80 s’accorde plutôt pas mal du caractère alambiqué de certaines compositions (« Eleanor Rigor Mortis »), la prise de risque maximale s’avérant être ce « Flesh Ripping Sonic Torment Limited » de quasiment 10 minutes, ponctué de passages franchement inhabituels dans le paysage carcassien (soli aériens sur fond d’arpèges, un break inattendu mais bien senti) et dont le côté joueur trouve un pendant assassin sur le final de l’opening track. Conjuguée à un art de la relance consommé et une indiscutable science du riff, l’optique de ralentissement générale du tempo s’avère globalement une réussite, chaque passage rapide donnant dès lors dans une réjouissance régressive du plus bel effet (les deux extrémités de « Eleanor Rigor Mortis », le feu d’artifice final de « Dance Of Ixtab », « Kelly’s Meat Emporium »).
Question remontrances, on ne pourra néanmoins passer outre un ventre mou assez problématique en piste 4 et 5, entre « The Devil Rides Out » bien mou du genou et une « Under The Scalpel Blade » dont on se demande pourquoi elle n’est pas resté cantonnée à
« Despicable ». Plus généralement, l’optique revival à l’ancienne ponctuée de références heavy aurait pu s’accommoder d’une production moins anonyme et d’un grain de guitare plus prononcé. On se consolera avec les cordes vocales éraillées d’un Jeff Walker toujours en grande forme, sa voix caractéristique faisant toujours merveille et contrastant idéalement avec les fulgurances mélodiques d’un Bill Steer un coup sur la réserve, un coup en mode épate (on préfère quand tu envoies mon petit Bill !). Finalement, c’est peut être sur les deux dernières pistes que CARCASS trouve son point d’équilibre entre respect du cahier des charges et relecture d’influences d’un autre temps, la dynamique imparable de « Caveat Emptor » et « The Scythe’s Remorseless Swing » achevant de faire basculer ce « Torn Arteries » du bon côté de la barrière.
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