chargement...

haut de page
Remontez pour accéder au menu
56 visiteurs :: Invité  » se connecter  » s'enregistrer

Carcass - Reek Of Putrefaction

Chronique

Carcass Reek Of Putrefaction
Cela ne vous arrive jamais d’être face à des albums dont vous avez tellement entendu parler que finalement vous avez finalement le sentiment de les connaître par cœur alors qu’en fait il n’en est rien ? Je suis exactement dans ce honteux cas de figure avec les trois premiers albums de CARCASS. Il faut dire qu’en 1988 (« Reek of Putrefaction »), 1989 (« Symphonies of Sickness ») puis 1991 (« Necrotism – Descanting the Insalubrious »), j’étais encore un peu jeune pour avoir conscience que tant de fureur était à portée de mes doigts. Je la voyais bien pourtant cette pochette de « Necrotism » chez mon disquaire favori (Discoshop, à Bayonne, où je me languissais alors adolescent de la vendeuse) mais, pour une raison dont je ne me rappelle plus, je ne l’ai jamais acheté. Quel con, aujourd’hui je serai le fier possesseur d’une édition vinyle d’époque… Bon, ça ne sert à rien de regretter, j’ai, comme beaucoup, réellement découvert les Anglais avec « Heartwork », un disque que j’apprécie encore énormément. Mais on s’en fout certainement de mes souvenirs.

Il est difficile de vouloir parler de « Reek of Putrefaction », album fondateur du goregrind sans être tenté de chercher à refaire la genèse du truc, planter le décor d’un Liverpool pendant les années 80 et de ce qu’était la musique dominante à cette époque-là. A quoi bon de toute façon ? Ils sont tellement à l’avoir écrit avant moi que l’effort me semble un peu vain… Le seul truc un tant soit peu intéressant, ça reste de se demander si plus de trente ans après, cette musique tient encore la route et pourrait être conseillée à de jeunes pousses qui souhaiteraient se familiariser avec le style. Evidemment que la réponse est « oui », je me demande même pourquoi je me la pose. Et les raisons sont innombrables.

Déjà, il y a l’illustration originale. Putain, ce collage de chair autour de ce visage central qui mange des corps, on pense à la gueule des Enfers (enluminure du Maître de la Cité des Dames, début XVème), aux nombreuses représentations du Diable dévorant des humains, c’est à la fois immonde et une véritable œuvre d’art que l’on a envie d’accrocher au mur, pas de la daube contemporaine façon Andres Serrano qui prend sa merde en photo.

Ensuite, tu as le pseudonyme des mecs : Frenzied Fornicator of Fetid Fetishes and Sickening Grisly Fetes pour Jeff Walker (basse, chant), Gratuitously Brutal Asphyxiator of Ulcerated Pyoxanthous Goitres pour Bill Steer (guitare, chant) et Grume Gargler and Eviscerator of Maturated Neoplasm pour Ken Ownen (batterie, chant), ça pèse tellement que les mots me manquent. Ce trio, c’est une putain de dream team appuyée par le label extrême de l’époque : Eararche Records, l’un de ceux qui ont le plus compté dans l’histoire du metal au sens large.

Enfin, s’il est exact que CARCASS n’a pas inventé le grind (NAPALM DEATH était là avant, il y avait aussi TERRORIZER, les monstres belges d’AGATHOCLES, etc.), les mecs ont en revanche introduit (du moins je crois) le concept de l’imagerie médicale là où, globalement, les autres formations faisaient de la politique (héritage du punk hardcore), voire recyclaient des thématiques issues du thrash ou du death metal. Eux sont partis dans le dégueulasse, la médecine légale pratiquée par des pervers ayant développé une fascination pour les instruments du légiste, les fluides corporels, le mucus, les cavités, l’éviscération, le démembrement, les organes génitaux, le travail des asticots sur un cadavre, etc., etc., etc. Tu as envie de vomir ? C’est bien.

Autre élément majeur à prendre en compte lorsqu’on part à la découverte de cet album : le son. Clairement, l’évolution de la production tout au long de la discographie me semble symptomatique du rapport même qu’a le groupe à son concept. Plus l’on avance dans le temps et plus l’imagerie passe de la barbaque au clinique (cf. la pochette de « Surgical Steel » notamment), le rendu sonore étant à l’avenant : nous sommes passés du brouillon noise baveuse à la précision froide. Vous me direz que d’une, cela est avant tout lié à la qualité des infrastructures d’alors (en gros, les studios ne savaient pas encore trop bien comment faire sonner correctement cette musique), de deux le style étant radicalement différent, on imagine mal les compositions de « Torn Arteries » enregistrées comme en 1988. Effectivement, cela n'aurait que peu de sens même si les deux mondes ne sont pas si irréconciliables que cela, une formation telle que LIPOMA parvenant très habilement à faire cohabiter le goregrind avec des plans clairement death mélodique dans l’esprit des récents CARCASS donc… Mais le son de « Reek of Putrefaction », qu’en dire ? Pas grand-chose si ce n’est qu’il est exactement celui que nombre de musiciens actuels cherchent à obtenir en y mettant les moyens. Grésillant, chaotique, frôlant parfois l’inaudible, brutal et sans concession aucune à une once d’agréabilité, c’est du papier de verre frotté sur des tympans à vif, rien de plus. En synthèse, il faut aimer ce qui ne respecte aucune norme d’hygiène et ne pas être trop mélomane : on ne pige clairement pas tout ce qu’il se passe au cours des vingt-deux titres, je me demande même parfois si les instrumentistes comprennent eux-mêmes ce qu’ils jouent bien que j’imagine qu’exercer son art à un tel niveau d’intensité, en termes de vitesse comme d’obscénité, doit plonger dans une espèce de transe, d’état second où l’intention finit par primer sur la précision. Quoi qu’il en soit, la rigueur, le trio s’en fout pas mal (à l’image de l’exécrable tentative de solo sur « Vomited Anal Tract ») et on lui pardonne bien volontiers lorsqu’il assène des branlées ultimes telles que « Splattered Cavities ».

Du côté du chant, il est bien sûr au diapason de la musique. Jeff Walker n’a pas encore adopté le timbre qu’on lui connaît, même si les prémisses sont déjà là, bien appuyés. Nous sommes plutôt dans l’ultra caverneux emprunté au pire death metal qui soit avec évidemment des pointes hystériques caractéristiques du grind. D’ailleurs, le chant et la basse sont selon moi les deux éléments saillants du disque, le pauvre Ken Owen ayant du mal à exister au milieu de ce maelstrom de distorsion. Par conséquent il avoine, fracasse ses cymbales mais ce n’est qu’à partir de « Necroticism » que l’on pourra comprendre à quel point c’est un batteur génial.

Quant à Bill Steer, il vaut peut-être mieux voir sa prestation ici comme une forme de performance artistique, avec une vision globale, plutôt que chercher des riffs mémorables car, à part sur « Genital Grinder » et les quelques passages plus lents (genre « Pyosisified Rotten to the Gore »), il m’est bien difficile de retenir autre chose qu’un gargouillis de larsens (« sourd, on devient sourd, toutes ces sirènes dans nos cours, ça nous gêne » - Zazie parlant du jeu de Bill dans sa chanson « Larsen »), des dérapages incontrôlés, le tout m’occasionnant un peu de pitié pour son instrument. Bon, compte-tenu de ce qu’il fera par la suite, on se contentera ici de s’extasier devant un tel effort de nuisance.

Evidemment, cet article n’a pas pour ambition de remettre en question le statut qu’a acquis « Reek of Putrefaction » au fil des ans, son importance ainsi que son influence parlent pour lui. Disons que cela a été surtout pour moi l’occasion de me pencher sérieusement sur un disque jusqu’alors survolé afin de mieux comprendre la fascination qu’il exerce encore aujourd’hui, tout en m’acquittant de mon devoir de mémoire. « Dans cent ans peut-être aussi encore » (si vous avez la référence).

DONNEZ VOTRE AVIS

Vous devez être enregistré(e) et connecté(e) pour participer.

AJOUTER UN COMMENTAIRE

 
Vous devez être enregistré(e) et connecté(e) pour participer.
Carcass
notes
Chroniqueur : 7.5/10
Lecteurs : (3)  7.33/10
Webzines : (2)  8.34/10

plus d'infos sur
Carcass
Carcass
Death n' roll - 1986 - Royaume-Uni
  

formats
  • Vinyl / 0 - Earache Records

tracklist
Side A - Faecal Disarticulation
01.   Genital Grinder  (01:32)
02.   Regurgitation Of Giblets  (01:24)
03.   Maggot Colony  (01:37)
04.   Pyosisified (Rotten To The Gore)  (02:55)
05.   Carbonized Eye Sockets  (01:11)
06.   Frenzied Detruncation  (00:59)
07.   Vomited Anal Tract  (01:45)
08.   Festerday  (00:22)
09.   Fermenting Innards  (02:35)
10.  Excreted Alive  (01:21)
11.   Suppuration  (02:19)
Side B - Anal Disgorgement
12.   Foeticide  (02:46)
13.   Microwaved Uterogestation  (01:24)
14.   Feast On Dismembered Carnage  (01:27)
15.   Splattered Cavities  (01:54)
16.   Psychopathologist  (01:18)
17.   Burnt To A Crisp  (02:43)
18.   Pungent Excruciation  (02:31)
19.   Manifestation Of Verrucose Urethra  (01:02)
20.   Oxidised Razor Masticator  (03:13)
21.   Mucopurulence Excretor  (01:09)
22.   Malignant Defecation  (02:14)

Durée : 39:41

parution
28 Juillet 1988

voir aussi
Carcass
Carcass
Necroticism
(Descanting the Insalubrious)

1991 - Earache Records
  
Carcass
Carcass
Heartwork

1993 - Earache Records
  
Carcass
Carcass
Swansong

1996 - Earache Records
  
Carcass
Carcass
Symphonies Of Sickness

1989 - Earache Records
  
Carcass
Carcass
Despicable (EP)

2020 - Nuclear Blast Records
  

Essayez aussi
Sublime Cadaveric Decomposition
Sublime Cadaveric Decomposition
Sublime Cadaveric Decomposition

2001 - Bones Brigade Records
  
Lymphatic Phlegm
Lymphatic Phlegm
Pathogenesis Infest Phlegmsepsia

2002 - Black Hole Productions
  
Sulfuric Cautery
Sulfuric Cautery
Suffocating Feats of Dehumanization

2023 - Blast Addict / Haunted Hotel Records / 625 THRASH / Malokul
  
Charcuterie / Pharmacist
Charcuterie / Pharmacist
Forensically Undetectable Waste (Split-CD)

2021 - Acid Redux Productions
  
Regurgitate
Regurgitate
Carnivorous Erection

2000 - Relapse Records
  

Metallica
...And Justice For All
Lire la chronique
Fatal Collapse
Fatal Collapse
Lire la chronique
Reavers
Violator (EP)
Lire la chronique
Forbidden
Twisted Into Form
Lire la chronique
European Assault 2024
Diocletian + Hexekration Ri...
Lire le live report
Darkest Hour
Perpetual | Terminal
Lire la chronique
Terravore
Spiral of Downfall
Lire la chronique
Diabolus In Musica - Exposition Philharmonie de Paris
Lire le dossier
Forbidden
Forbidden Evil
Lire la chronique
Brodequin
Harbinger Of Woe
Lire la chronique
Invocator
Excursion Demise
Lire la chronique
Necromanteum EU/UK Tour 2024
Aborted + Carnifex + Revoca...
Lire le live report
Headless Hunter
The Undertaker
Lire la chronique
Exa
Left in Shards
Lire la chronique
Master
Saints Dispelled
Lire la chronique
Cryptosis + Cynic + Obscura
Lire le live report
Deliver the Suffering
Unleash the Chaos (EP)
Lire la chronique
Dissimulator
Lower Form Resistance
Lire la chronique
The Focus of a Valediction European Tour 2024
Cryptosis + Cynic + Obscura
Lire le live report
No Mercy
Widespread Bloodshed... Lov...
Lire la chronique
Nuclear Eric 50th anniversary show
Blackened + Funeral Desekra...
Lire le live report
No Return
Self Mutilation
Lire la chronique
Campaign for Musical Destruction Tour 2024
Master + Napalm Death + Pri...
Lire le live report
Monolyth + Përl + Nemost
Lire le live report
Electrocutioner
False Idols
Lire la chronique
Kaos 696 Winter War 2024
Helldrifter + Impiety + Nihilo
Lire le live report
Acid Force
World Targets In Megadeaths
Lire la chronique
Eradikated
Descendants
Lire la chronique
Bilan 2023
Lire le bilan
The Bleeding
Monokrator
Lire la chronique
Les Sakrif'or BLACK METAL 2023
Lire le podcast