Que l’on n’aime ou pas les derniers travaux de Watain, il y a bien une chose que l’on ne peut pas leur enlever, c’est leur intégrité et le respect que le groupe peut porter à l’égard de son public particulièrement dévoué. De fait, malgré les déceptions relatives que sont pour beaucoup
The Wild Hunt et
Trident Wolf Eclipse, nombreux sont également ceux qui continuent d’être très attachés à la formation d’Uppsala qui contre vents et marrées continue ainsi de tracer sa voie. Quatre ans après leur sixième album, les Suédois sont aujourd’hui de retour avec un
The Agony & Ecstasy Of Watain qui une fois encore ne devrait pas faire l’unanimité (notamment parmi les plus anciens adeptes du groupe qui ne jurent que par les deux ou trois premiers albums) mais qui néanmoins devrait être en mesure de redonner le sourire à tous ceux qui depuis 2013 l’ont justement vu s’effacer au gré des différentes sorties du groupe...
Premier point extrêmement engageant, l’artwork. Bien que très chargée, je trouve en effet l’illustration de l’Indonésien Oik Wasfuk particulièrement réussie (bien plus que celle qu’il signait pour
Trident Wolf Eclipse qui sans être mauvaise ne m’avait pas pleinement convaincu en raison de perspectives un brin naïves) tout comme ce logo incroyable de détails signé des mains d’Erik Danielsson lui-même. Côté production, et ce n’est évidemment une surprise pour personne, le groupe est retourné pour la énième fois au Necromorbus Studio sous la directive de l’indéboulonnable Tore Gunnar Stjerna. De fait, il n’y a de ce côté là par grand chose à signaler puisque l’on va retrouver le son typique et efficace des derniers albums de Watain avec les mêmes qualités (ces guitares froides et abrasives ainsi que cette batterie dynamique, moderne mais néanmoins naturelle) et défauts (notamment cette basse malheureusement toujours aux abonnés absents).
Cependant, vous vous en doutez, en ces quelques points ne résident pas les principales raisons de ces réjouissances évoquées un petit peu plus haut. Non, si certains risquent effectivement de retrouver un petit peu le sourire à l’écoute de ce nouvel album (qui n’est pas non plus le meilleur qu’ait sorti Watain) c’est parce que celui-ci s’avère tout simplement plus abouti que son prédécesseur qui en dépit d’une urgence retrouvée peinait à convaincre faute de profondeur. Plus contrasté, plus travaillé et fournit mais surtout un petit peu plus marquant, il y a en effet dans les dix nouvelles compositions de
The Agony & Ecstasy Of Watain un caractère beaucoup moins vain que le sympathique mais très vite oublié
Trident Wolf Eclipse. Du haut de ses presque cinquante minutes (soit seize de plus que son prédécesseur pour qui n’aurait pas la version limitée comprenant le morceau "Antikrists Mirakel"), ce septième album traduit par la simple expression de ses chiffres (la durée de l’album évoquée ci-dessus mais également celles des titres dont beaucoup se situent au-delà des six minutes) la volonté des Suédois d’offrir à leurs auditeurs quelque chose de plus consistant tout en conservant, il est vrai, cette urgence et cette intensité qui faisait quelque peu défaut à
The Wild Hunt.
À la manière de son prédécesseur qui avait ainsi surpris par ce retour aux fondamentaux,
The Agony & Ecstasy Of Watain se distingue lui aussi par une cadence relativement soutenue que ce soit à coup de titres haletants menés le couteau entre les dents ("Ecstasies In Night Infinite", "The Howling", "Leper's Grace", "Funeral Winter") ou de séquences particulièrement intenses et musclées ("Black Cunt" à 0:24 et 4:10, "Before The Cataclysm" à 0:25, "Septentrion" à 2:50). Une énergie et une fougue contagieuses et enthousiasmantes qui rappellent que Watain n’a jamais été là pour amuser la galerie et que même si la formule proposée par les Suédois n’a rien de bien nouveau à offrir, il sait encore, et cela en dépit de quelques errements, se montrer d’une efficacité à toute épreuve. Ces instants permettent également de mettre en exergue un riffing plus inspiré qu’il y a quatre ans. Certes, le travail de Nils Håkan Jonsson et d’Erik Danielsson n’a jamais rien eu de révolutionnaire (malgré une indéniable identité) mais à la différence là encore de ce qui nous a été proposé sur son prédécesseur, les moments forts et véritablement marquants finissent rapidement par s’imposer au fil des écoutes ("Ecstasies In Night Infinite", "The Howling", "Black Cunt", "Leper's Grace", "Before The Cataclysm", "We Remain", "Funeral Winter", "Septentrion").
Pour contraster avec ces passages les plus véhéments et ainsi nourrir une véritable dynamique tout au long de ces quarante-neuf minutes, Watain va prendre également beaucoup de plaisir à lever le pied afin de nous offrir quelques titres et autres moments nettement plus atmosphériques et mélodiques. Là encore, pas de surprise puisque ce n’est pas la première fois qu’Erik Danielsson et ses acolytes nous font le coup. Néanmoins, ce serait mentir de dire que nous y sommes insensibles. Du très sympathique "Serimosa" (bien qu’un brin linéaire) qui vient apaiser ces premières ardeurs en passant par les plus intéressants et très contrastés "Black Cunt" et "Before The Cataclysm" sans oublier bien entendu l’excellent "We Remain" aux atmosphères ritualistes entêtantes sur lequel Farida Lemouchi (Molasses, ex-The Devil's Blood) et Bengt Gottfrid Åhman (Invidious, ex-In Solitude, ex-Reveal!...) viennent apporter leurs brillantes contributions, les changements de tons et d’intensités ne manquent pas et font même beaucoup de bien à Watain qui mène ici la danse comme bon lui semble. Une diversité dans le propos qui fait de
The Agony & Ecstasy Of Watain un disque varié et dynamique toujours aussi agréable à écouter au fil des écoutes même successives.
Faites de hauts (
Casus Luciferi,
Sworn To The Dark…) et de bas (
The Wild Hunt,
Trident Wolf Eclipse), la carrière de Watain n’est pas ce que l’on peut appeler un long fleuve tranquille. Et même si la formation d’Uppsala doit effectivement beaucoup à un groupe tel que Dissection, cela ne l’a pas empêché de tracer sa propre route depuis maintenant plus de vingt ans et de récolter les fruits de son labeur et de son dévouement. Quoi qu’il en soit, après deux albums en demi-teintes ayant pour eux autant de défauts que de qualités, Watain semble enfin prêt à inverser la tendance avec un disque qui devrait normalement faire davantage consensus et ramener vers lui au moins une partie de cet auditoire déçu par ces incursions en terres Heavy Metal ou par ce manque flagrant de vision une fois passé l’excitation d’une seconde jeunesse retrouvée. Pour autant
The Agony & Ecstasy Of Watain n’est pas le meilleur album qu’ait composé et enregistré Watain mais plutôt un rappel en bonne et due que celui-ci est finalement capable de mieux que ce qu’il nous propose depuis maintenant près de dix ans... Bref, il y a là de quoi se réjouir mais on a connu le groupe encore plus convaincant. S’agirait désormais de s’en souvenir pour la prochaine fois. En attendant, ne boudons pas notre plaisir.
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