On a tous des groupes qui ont fait notre bonheur et notre malheur. En ce qui me concerne, Riverside en fait malheureusement partie. Une prometteuse entrée en matière (
"Out Of Myself"), puis une excellente mise en bouche (
"Voices In My Head"), pour finalement aboutir à un chef d'oeuvre (
"Second Life Syndrome"), je n'aurais jamais pensé qu'il me décevrait un jour. Et pourtant,
"Rapid Eye Movement" a bien eu l'effet d'une véritable douche froide pour moi, à tel point que j'ai totalement arrêté de m'y intéresser. 4 ans plus tard, j'apprends que ces derniers ont sorti un album en 2009. J'y jette une oreille par curiosité. Premières minutes de "Hyperactive". Je n'ai pas décroché.
La fin du concept "Reality Dream" qui a rythmé leur carrière jusqu'à maintenant, a dû provoquer une certaine remise en question. Comment repartir après tant d'énergie déployée dans ce triptyque ? La réponse de Riverside sera en fin de compte très claire : totalement différemment. Visuellement tout d'abord avec un artwork qui contraste avec les précédentes productions et l'abandon de leur logo (ce qui n'est pas un mal), puis sur le format puisque cet album compte seulement 5 titres pour une durée de près de 45 minutes. Les durées des titres vont d'ailleurs crescendo, allant de moins de 6 minutes pour "Hyperactive" pour aboutir aux 12 minutes de "Hybrid Times". Même à l'écoute de ce quatrième opus, on ressent à chaque moment un souffle de liberté, un besoin de tout changer, comme si les polonais sortaient d'une détention d'une demi-décennie pour élaboration d'une trilogie.
En plus d'être réellement surprenant à de nombreux égards, "Anno Domini High Definition" est avant tout un véritable chef-d'oeuvre. Il condense à la fois tout ce que le groupe à pu faire jusqu'à maintenant, tout en proposant certaines facettes que l'on ne leur connaissait pas. Vu la richesse de leur style à la base, ajouter de nouvelles choses pourrait paraître improbable et pourtant, dites vous bien qu'ici, il n'y a désormais aucune limite. Chaque composition part dans tous les sens, alterne passages calmes et passages violents, mêle sonorités brutes et délires progressifs, atmosphère tantôt mélancolique et tantôt plus futuriste... Il n'y aura pas besoin d'aller plus loin que les 2 premières minutes de "Hyperactive" pour voir que ça ne pose aucun problème à Riverside d'enchainer un magnifique morceau de piano avec un gros riffs électrique bien gras. Imprévisible, leur musique devient un véritable labyrinthe où chaque détour vous assure une découverte, et chaque réécoute une redécouverte. La seule véritable constante que l'on peut établir autour de ces cinq pièces, est l'ambiance résolument froide, triste et moderne, dépeignant un avenir proche (voir présent ?). Le visuel et le titre de l'album "Anno Domini High Definition" (traduisez "L'inauguration de l'ère de la haute définition") illustrent parfaitement ce qui se dégage de leur musique, d'un point de vue plutôt négatif comme vous l'aurez imaginé, un futur rapide, impersonnel et synthétique.
"Anno Domini High Definition" est riche, complexe, mais n'allez surtout pas croire qu'il est bordélique. Le combo maîtrise parfaitement chaque changement de rythme, chaque changement d'atmosphère. Tout s'imbrique parfaitement dans un tout logique. Mais le groupe ne s'est pas arrêté là. En effet, l'imposant travail de composition pourrait me faire parler sur chaque riff, de la beauté du plus simple comme celui qui ouvre "Left Out", en passant par l'ingéniosité de nombreux autres construits tout en contre-temps, ou encore ceux qui mettent à profit chaque instrument pour en extraire toute leur puissance et leur émotion. On sent bien que ce quartette n'est pas ensemble pour rien. Leur complémentarité est évidente et leur talent de musicien incontestable, aussi bien techniquement qu'au niveau du feeling. Plus instrumental que leurs précédentes productions, cet album laisse d'ailleurs beaucoup de place à chacun pour s'exprimer. Et ces solos de guitare... Ils me prennent aux tripes à chaque fois (si vous voyez un gogole avec les cheveux longs qui fait du air guitar, c'est peut-être moi). Il serait tout de même criminel de ne pas évoquer le chant de Duda, absolument parfait comme d'habitude, capable d'une grande sensibilité comme d'une grande puissance.
Cet opus est également le théâtre de nombreuses expérimentations. On y retrouve notamment énormément d'électronique (ça va de soit) ainsi que de nombreux effets et arrangements qui viennent renforcer l'atmosphère. Le groupe prend pas mal de risques et ose parfois le tout progressif mais ne tombe jamais dans le piège de la faute de goût. Seul un passage me laisse un peu perplexe sur "Egoist Hedonist" à 3'00" mais je vous laisserai le découvrir. Excepté peut-être quelques nappes de claviers un peu trop osées pour moi (c'est vraiment histoire de chipoter), la seule chose qui m'empêche de lui mettre 10, c'est sa (trop) courte durée. 45 minutes c'est déjà pas mal me direz-vous mais je vous assure qu'on en redemande à la fin de "Hybrid Times". Un sixième titre manque cruellement.
De part sa grande complexité, il vous faudra un certain temps pour l'apprivoiser. L'avantage bien sûr, c'est que vous pourrez l'écouter des dizaines de fois et y découvrir encore quelque chose. Beau, touchant, puissant, surprenant, "Anno Domini High Definition" n'a rien à se reprocher. Les polonais signent ici une oeuvre riche et personnelle, qui vous tiendra en haleine des premières minutes de "Hyperactive" aux derniers souffles de "Hybrid Times". Mention spéciale à "Left Out" qui concentre pour moi, tout ce que Riverside sait faire de mieux, de sa magnifique intro à ses travers plus torturés. En tous cas, j'ai bien compris le message et je n'attendrai plus 2 ans avant de m'envoyer leur prochaine sortie. Et vous devriez en faire de même, croyez-moi.
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