L’infâme (et inutile) réenregistrement de
Under The Sign Of Hell (sorti en décembre 2011) m’aura finalement poussé à chroniquer ce bijou (manquant cruellement à notre site) et ainsi rétablir la vérité sur ce chef d’œuvre du black metal de la fin des année 90, à une époque bien éloignée de la production synthétique (plastique) ou du jeu de batterie atroce de Tomas Asklund… Après avoir usé des services de Frost (Satyricon) sur
Antichrist, Gorgoroth recrutera le batteur de Borknagar pour martyriser les fûts, un certain Grim. Les Norvégiens enregistreront alors en « live » un EP
The Last Tormentor puis retourneront rapidement au fameux Grieghallen Studio afin d’engendrer leur troisième incantation chez les défunts teutons de Malicious Records,
Under The Sign Of Hell (dont on ne compte plus les rééditions).
Gorgoroth ne change pas sa recette maléfique. Il reprend l’aspect mélodique d’
Antichrist (je ne suis pas d’accord avec la chronique de mon ancien collègue si ce n’est sur sa durée) mais ira cette fois conjuguer la musique à la furie de ses débuts. Infernus, tête pensante encore du groupe à l’époque, continue ainsi sur la voie de son « raw » black metal mélodique, mélangeant habilement ses références extrêmes et primitives (Darkthrone en tête) à une musique heavy aux teintes néoclassiques. Toujours au sein du même studio de renom, le son de « fond de cave » des deux premiers opus laisse pourtant place à une production plus puissante et des guitares relativement plus « claires » (la distorsion et les aigus étant toujours poussés à l’extrême, typique du producteur Pytten). Mais surtout un son de batterie qui gagnera un statut « culte » dans la scène. Impossible de ne pas lever le sourcil à la première écoute. Le fou furieux Grim ayant certainement construit sa batterie sous l’influence du Malin, que ce soit ses cymbales infernales rouillées par le sang ou la peau de sa caisse claire échangée par celle d’un sacrifice humain (« Revelation Of Doom » ou comment taper sur des rondins de bois). Un son unique. La technique et la martialité du métronome Frost sont remplacées par un jeu sans concession et riche, bien moins carré (certains passages étant limite à contre temps) certes mais c’est ce qui donnera tout son charme à l’œuvre. Le batteur « black metal » par excellence. Son suicide en 1999 marquera malheureusement son seul album au sein de Gorgoroth.
Au-delà de ce voyage en enfer rappelant
Pentagram (les monstrueux « Revelation Of Doom », « Blood Stains The Circle » et « The Rite of Infernal Invocation » agresseront suffisamment notre audition), l’artère principale de Gorgoroth reste avant tout sa force mélodique. L’approximation délectable des compositions de ses aînés (« raw black metal » étant parfaitement approprié), s’efface au profit de titres moins obscurs et créés pour se fondre rapidement à nos tympans. Un enchaînement de hits (joués à chaque concert) regorgeant de riffs mélodiques imparables et transpirant par tous les pores le Mal. Que ce soit le mémorable « Krig », le break frissonnant de « Funeral Procession », l’entêtant « Ødeleggelse og Undergang » ou bien l’ovni génialissime « Profetens Åpenbaring » (une introduction à placer au panthéon du genre). Titre dévoilant un peu plus le spectre vocal hallucinant du véritable aliéné qu’est Pest. Ses virées théâtrales grand guignolesques au chant clair, ses rires démoniaques ou encore ses cris/marmonnements/bruits inhumains (en anglais ou norvégien) ne pouvaient pas mieux s’associer à la musique. Cet homme est possédé. Pest qui la même année, aura réussi à offrir ses meilleures performances vocales en pondant deux pierres angulaires du black metal (le
Witchcraft d’Obtained Enslavement aux nombreuses similitudes musicales dans les influences classiques). L’un des meilleurs vocalistes du genre tout simplement et « le » frontman de Gorgoroth, quoiqu’on en dise.
Schizophrénique, malsain, sombre, violent, sale, glacial, mélodique… Tant d’adjectifs pour qualifier cette référence black metal au titre on ne peut plus adéquat.
Under The Sign Of Hell reste à ce jour le meilleur album de Gorgoroth. Malgré tout, comme tous les opus de la bande de Bergen, un format condensé (une petite demi-heure) qui ne peut que laisser sur sa faim… Surtout que l’on retrouve un interlude (le délirant « Postludium ») et une conclusion d’album (les 3 minutes fantômes de « The Rite Of Infernal Invocation ») pas forcément nécessaires (passages qui seront d’ailleurs supprimés lors du réenregistrement). Quelques minutes supplémentaires auraient pu attribuer la note maximale... Cela n’empêchera pas
Under The Sign Of Hell de jouir de son statut, « culte ».
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