Vouloir dire ce qu’un nouvel album d’Evoken a de justement nouveau est comme chercher à départager un enterrement d’un autre, une rubrique nécrologique de celle de la veille ou quelle méthode d’incinération calcine avec le plus d’efficacité : hors-sujet, au pire sordide, au mieux vain. Ainsi la tentation de laisser la chronique de
Quietus par Christliar comme fiche de présentation de la discographie des Ricains a été grande quand est sorti
Atra Mors, ce dernier faisant naître les mêmes questionnements que ses ainés.
Mais comme l’heure des bilans oblige finalement à « y passer », je dirai que, parmi les doomsters à qui est apposé le terme « Funeral », Evoken paraît aujourd’hui plus que jamais être le seul en activité méritant pleinement le mot. Non pas que les œuvres précédant ce cinquième album sont à oublier mais l’effondrement de la concurrence (Esoteric, Ahab ? Vous ne pensez pas à ces techniciens de surface tout de même ?) instaure davantage le groupe originaire du New Jersey comme la meilleure définition du genre. Par rapport à
Antithesis Of Light et
A Caress Of The Void, tout juste note-t-on un travail moins porté sur la matière et plus sur les couleurs – ne rigolez pas, placées sur l’échelle chromatique des essais antérieurs, des compositions comme « The Unechoing Dread » ou le morceau-titre sont bigarrées ! –, ce dernier longue-durée usant d’apparats romantiques pour accentuer le cynisme propre à la formation. On pénètre le caveau plus qu’on le dessine ici, les guitares travaillant moins le marbre qu’elles se plaisaient à sculpter dans des parties death jouées au ralenti (ce rôle est laissé majoritairement à la basse de David Wagner pleine des hachoirs déjà aperçus chez Funebrarum) et s’attachant à exprimer la sérénité des squelettes y habitant. Ainsi les éléments atmosphériques du quintet se trouvent mis au premier plan par une production délicate où claviers et violoncelles prennent une large place et possèdent leurs moments dédiés (« Into Aphotic Devastation » et sa mélodie de départ ou encore la grandiloquence finale de « Grim Eloquence » restant dans la thématique puisque belle à en crever).
Evoken se serait attendri, alors ? Non, simplement,
Atra Mors se met au diapason des ritualistes de sa pochette cachant leur humanité sous les bures. Quelques nuances éclatent mais elles sont passées au filtre Instagram propre aux Ricains, des nuances délavées, funèbres, revenant à discuter quel endeuillé possède le vêtement le plus sombre et manquer l’essentiel de la cérémonie. Une fois les considérations esthétiques passées, un mystère similaire à celui de
Shades Of Night Descending finit par nous enrober, celui d’une musique soignée et austère, apaisante et barbare, éternelle et brutale, cette énigme causée par un primaire allant des râles de John Paradiso aux leads à la cruauté voilée sous les effets, ces enchainements transformant le fluide en escarpé et autres incompréhensibles évènements qui évitent souvent l’apparition frontale et pourtant, bouleverse.
Bien sûr qu’
Atra Mors n’apporte fondamentalement rien de plus que ses prédécesseurs. La fatalité qu’il appelle reste la même. Malgré tout, Evoken subjugue autant qu’auparavant et s’il n’y avait pas l’attachement aux premières fois (l’indétrônable
Quietus) ainsi que quelques mélopées utilisées pour allonger un disque qui n’est pas le dernier à tartiner (les instrumentales « A Tenebrous Vision » et « Requies Aeterna », dispensables), sans doute aurait-il eu une meilleure place au Panthéon de 2012. Oui, Panthéon, car c’est bien de glorification dont on cause, l’important ici n’étant pas l’habitude aux funérailles de toutes sortes mais bien ce talent à montrer que quelque soit l’instrumentalisation dont la mort fait l’objet, quand celle-ci apparaît, le même visage angoissé d’interrogations accueille cette chose placide qui cependant tue et qu’Evoken continuera de personnifier pour, espérons-le, longtemps.
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