Jamais dans ma vie de chroniqueur je ne m'étais encore essayé à l'exercice de la double chronique. L'arrivée de Matpewka dans les rangs de Thrashocore est venue quelque peu chambouler tout ça puisque pour sa première chronique d'embauche, celle qui nous est envoyée en interne pour validation, elle a choisi le dernier disque de Cultes Des Ghoules,
Henbane. Problème, cet album était sur ma liste de réservation depuis déjà un petit moment suite à la défection de Geisterber.
Si je n'avais pas forcément prévu de rédiger une chronique tout de suite, il était cependant impensable que je passe à côté de cet album qui figure tout de même parmi les meilleures sorties de mon top 2013. Avec quelques mois de retard, voici donc l'avis de deux chroniqueurs sur l'un des albums de Black Metal les plus passionnants de l'année dernière. Un incontournable, en quelque sorte...
Originaire de Pologne, Cultes Des Ghoules (dont le nom s'inspire de la mythologie Lovecraftienne) voit le jour en 2004 sur l'impulsion de De Retz et Devil's Kin du groupe Bestial Raids. Dix ans plus tard, les instigateurs de ce projet ont tous les deux désertés le navire au profit de disciples heureusement habités par le même feu intérieur.
Henbane (de son vrai nom
Henbane..., Or Sonic Compendium Of The Black Arts) est ainsi le deuxième album de Cultes Des Ghoules et fait suite au déjà très convaincant, bien qu'en tous points inférieur,
Häxan sorti en 2008.
Du haut de ses cinquante-huit minutes,
Henbane à de quoi décourager même les plus appliqués. Car loin d'être facile d'accès, le Black Metal des Polonais demande un certain degré d'engagement pour espérer être assimilé et pouvoir ainsi apprécier à leurs justes valeurs ces cinq titres éprouvants. L'auditeur curieux mais encore vierge de tout frissons devra alors faire face à une succession de structures alambiquées, de séquences rythmiques mouvantes et souvent décousues, de voix monstrueuses, schizophrènes et terrifiantes, d'instruments exotiques ou encore de samples obscures et poussiéreux. Des compositions à tiroirs s'étirant toutes au delà des dix minutes (à l'exception de "Festival Of Devotion" qui n'affiche qu'un petit 8:58) et qui attestent d'une personnalité bien trempée faisant de Cultes Des Ghoules un groupe définitivement à part dans le paysage Black Metal.
Et si le travail d'écriture est plutôt dense et complexe, que dire de celui qui est fait sur les ambiances? Intrinsèquement liée à chacune de ces cinq compositions, l'atmosphère générale est probablement le plus gros point fort de ce nouvel album. Aidé par une production rachitique mais tout à fait adéquate (signée M de Mgla), Cultes Des Ghoules nous emmène avec lui dans un autre monde, celui de sorcières lugubres et de la magie noire, celui des spectres rampants et vicieux, celui des incantations et des rites occultes, celui où tout est gris et desséché et où plus rien ne pousse, plus rien ne vie. Un autre monde, une autre époque nourrit par un esprit médiéval maléfique. Une mise en abime immersive et incroyablement réelle grâce à cette guitare abrasive aux riffs tordus mais redoutables, à cette basse corrosive et bien présente, à cette batterie sèche et aliénante et surtout grâce à cette voix totalement folle et possédée de Mark Of The Devil. Jamais je n'ai entendu un chanteur capable de faire ressentir avec autant d'exactitude et de précision l'idée que l'on peut se faire de la schizophrénie, de l'aliénation mentale, de la possession spirituelle. Une affirmation sans équivoque qui peut être vérifiée sur l'incroyable "Vintage Black Magic" et ses ricanements sournois, cette voix gutturale exagérée et sans souffle, ces expirations sifflantes et incantatoires, ces cris vibrants et pourtant sans vie. J'en ai littéralement la chair de poule. Absolument sinistre!
Définitivement à part parmi la cohorte de groupes de Black Metal sur lesquels ont peut compter aujourd'hui, Cultes Des Ghoules fait presque figure d'électron libre. Une musique qui n'appartient qu'à lui malgré les images très fortes qu'elle renvoie. Une univers qui suinte la magie noire et la sorcellerie la plus occulte, un chanteur capable de mettre une voix sur absolument n'importe quel terme employé en psychiatrie, des compositions captivantes et étoffées... Avec
Henbane, Cultes Des Ghoules à franchit un cap après un premier album intéressant mais souffrant pourtant de quelques défauts (la production notamment) et un EP pas forcément évident à appréhender (un titre pour vingt-cinq minutes). Oui,
Henbane est clairement le disque Black Metal de l'année 2013 et pourquoi pas 2014.
AxGxB - 9/10
On se souvient de Cultes Des Ghoules pour
« Häxan ». Il avait déchaîné les passions en 2008 grâce à son climat primitif arborant un culte à Satan et avait séduit de ce fait les amateurs de Black Metal. Sans mauvais jeux de mots, il était déjà axé sur la thématique de la sorcellerie, qui provient d'ailleurs du film muet dano-suédois du même titre. Mais l'album précédent avait des points faibles qu' « Henbane » ne possède clairement pas. La différence de son est notable car sur ce dernier né, Cultes des Ghoules est mixé et masterisé par MGLA, chose qui peut ravir les auditeurs friands d'un son plus puissant. « Henbane » conserve cette peinture du Moyen-Age occulte pour la remplir de nouveau, cette fois-ci sans la moindre concession. Froidement, le quator polonais s'aventure au milieu de la forêt, entouré de sorcières. Les riffs vous absorbent complètement et l'atmosphère unique de cet album vous donne la chair de poule. Un tel niveau d'accroche est rare.
Fini les discussions, prenons de l'Henbane avec eux. Mais qu'est-ce que l'Henbane me direz-vous ?
Écoutez et vous verrez. Le rire des sorcières dès le premier morceau « Idylls of the Chosen Damened » ouvre la porte de l'Enfer. Et que le sabbat commence ! Nous sommes écrasés par la lourdeur et la vélocité du tempo, la torpeur est imminente. Brusquement, les voix sorties directement d'outre-tombe et les cris torturés retentissent religieusement dans une violente cacophonie. Des mains invisibles enlacent votre corps en le compressant petit à petit. Elles sont si gelées qu'elles le pétrifient. Ne prévoyez pas de laver par terre, les mélodies sont si troublantes qu'il sera impossible de verser le produit sur le sol et de prendre le manche à balai pour un balai normal. Ah mais oui, la tentation est grande... Trop tard, enfourchement réussi.
Ne résistez pas. La possession débute sur les rythmiques quasiment ethnique de « Vintage Black Magik » . Téléporté au sein d'une tribu primitive, l'ambiance cabalistique entraîne la pratique d'un rite vaudou. En osmose avec les personnes autour du feu, la transe explose. D'un coup, vous avez des flashs : êtes-vous chez vous en plein milieu de votre appartement ou êtes-vous en Afrique ?
Une danse déchaînée accompagnée de votre balai à sol commence autour de votre chaine hi-fi.
De plus, les claviers facilitent la communication avec les messagers de Satan : ils vous voit, ils vous effleurent, ils murmurent des insanités. Hallucinez-vous ? Ah, peut-être un effet de cette fameuse Henbane, qui sait.
La dévotion pour le malin crispe l'auditeur et le transperce. Nous bavons, les yeux se révulsent d'eux-mêmes. Sans comprendre réellement ce qui se passe, les mains en direction du plafond s'élèvent, des tremblements surviennent et l’aveuglement est total. Le culte est à son maximum, « Festival of Devotion » déferle en piétinant tout sur son passage. Alors que les pieds commencent à être ensevelis dans une sorte de sable mouvant, un rire machiavélique résonne dans la pièce : il pousse le sadisme jusqu'à marteler votre pauvre tête afin de l'enfoncer dans la sol. La terre rempli vos poumons mais vous êtes encore vivant ! Hallucinez-vous ? Ah, peut être un effet de cette fameuse Henbane, qui sait...ou trop d'eau de javel.
Soudain, vous hurlez frénétiquement une prière au Malin en boucle, dans une énergie telle que vous faites corps avec Lui.
Préconisation d'emploi/d'écoute : Allez dans la forêt en automne, installer quelques bougies sur le sol et déshabillez-vous entièrement.
To the East and to the South
To the West and to the North
Come! Come! We call Thee forth!
Matpewka - 9,5/10
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