Six années séparent
«Traced In Air » de «Kindly Bent To Free Us ». Six ans, à l’échelle d’un groupe traditionnel, ça peut paraître très long mais pas pour CYNIC. Il faut dire, après avoir en avoir patienté quinze pour trouver trace d’un successeur à
« Focus », tout de suite, on relativise l’attente ! Entre autres raisons, plus que la sortie des passe plats
« Re-Traced »/
« Carbon-Based Anatomy »/ « The Portal Tapes », on insistera plus volontiers sur la durée de vie conséquente du très bon
« Traced In Air » (malgré 35 petites minutes au compteur) que sur un constat d’ordre plus personnel : bien que sensible aux qualités du trio Malone/Masvidal/Reinert, dans l’absolu, je n’ai jamais été le plus grand fan de CYNIC qui soit. C’est donc délesté de toute pression que j’ai abordé « Kindly Bent To Free Us », opus dont je pressentais qu’il creuserait le fossé stylistique séparant les débuts death technique de l’orientation progressive défendue actuellement par le groupe.
Et bien sûr, ça n’a pas raté. Plus aérien que jamais, CYNIC tombe définitivement l’armure métallique pour endosser un costume plus en adéquation avec les aspirations du moment ; Paul Masvidal l’évoquait récemment dans une interview, il était temps pour eux de fusionner les facettes à priori opposées de leurs différents projets, et en premier lieu les velléités pop d’AEON SPOKE. Histoire de mieux préparer le terrain, CYNIC sonne la fin des hostilités avec deux premières salves plutôt classiques : si « True Hallucination Speak » et « The Lion’s Roar » semblent détonner par rapport au contenu de
« Traced In Air », c’est donc plus sur le fond que sur la forme. D’emblée, on notera la plus grande place accordée à la basse de Sean Malone et aux envolées de chant clair de Paul Masvidal, les guitares saturées et quelques rares passages défouloir à la double ramassant les miettes (sur « Moon Heart Sun Head » et « True Hallucination Speak ») d’une production aux accents prog rock prononcés. Un peu de vocodeur par ci par là (« Infinite Shapes »), quelques riffs caractéristiques (« Holy Fallout », « Kindly Bent To Free Us ») et toujours cet art consommé de tourner constamment autour du pot, en bridant le moteur dès que la machine s’emballe. S’il s’est délesté de ses aspérités les plus saillantes, dans son refus de céder au démon efficacité, CYNIC n’a pas tellement changé. Ce qui surprend nettement plus en revanche, c’est que sur « Kindly Bent To Free Us », on ne dépasse qu’à de rares moments le stade de l’aimable curiosité.
Quel dommage que CYNIC n’ait pas davantage insisté sur la fibre post rock qu’on retrouve sur « Gitanjali » et surtout « Holy Fallout », deux titres qui ont le mérite d’émerger un tant soit peu de cet entre deux eaux un peu tiède. Des riffs dissonants, une sensation de malaise diffuse ; voilà qui concorde enfin avec la douce absolution promise par l’artwork. Bien sûr, le post apocalyptique vu par CYNIC n’a pas grand-chose à voir avec l’explosion de super mutants à la rotative d’une célèbre licence de jeu vidéo. Si fin des temps il doit y avoir, on n’en verra ici que les prémices bien au chaud dans son abri antiatomique, lorsque l'on en est encore à se réjouir que le bac à bières soit plein et surtout que le connard d'en face n’ait pas pu rallier à temps les portes de son sous-sol. De ce point de vue-là, « Holy Fallout » et ses guitares lead spectrales en fin de titre sont ce que « Kindly Bent To Free Us » a de meilleur à nous offrir. Pour le reste, si les passages les plus cotonneux de l’album emportent l’adhésion (la bien planante « Infinite Shapes »), on n’en dira pas autant de tout ce qui rappelle, de près comme de loin, l’ancien CYNIC. Autant de passages obligés peu inspirés au regard de ce à quoi le groupe nous a habitué, notamment quelques soli à la limite du pénible (« Moon Heart Sun Head »).
Pas aussi contrasté qu’il voudrait l’être, ce troisième full length coupera net le lien distendu qui unissait encore CYNIC aux fans de la première heure. A l’inverse, on trouvera bien quelques radicaux prétendant avoir enfin trouvé, passé 113 écoutes, la clé d’un de ces nouveaux chefs d’œuvres incompris par la base. Mon sentiment est que cet album, qui se voulait lumineux, ne suscite au final guère d’émotion. La faute à Paul Masvidal, dont le chant maniéré reste un peu tape-système ? Sans démériter (en musiciens accomplis, les deux Sean sauvent pas mal de meubles), CYNIC passe un peu à côté de son sujet. Les modérés donc, ceux pour qui la sortie d’un nouveau CYNIC est juste synonyme de disque à fort potentiel, se contenteront d’empiler les conserves en attendant qu’Ahmadinejad la fasse péter pour de bon, cette putain de bombe.
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