Si Incantation avait mis plus de six années à nous offrir une suite à
Primordial Domination, depuis
Vanquish In Vengeance, on n'arrête plus les Américains! Il y a eu
Dirges Of Elysium à peine deux ans plus tard puis une compilation pour fêter ses vingt-cinq ans de carrière, un autre recueil de démos poussiéreuses ainsi qu'un live de 1991. Beaucoup de vieilleries certes mais cela montre que la machine Incantation tourne plus que jamais. Le groupe culte reste aujourd'hui encore un fer de lance de la scène death metal et une influence incontestable. Et il y a enfin ce nouvel album,
Profane Nexus, arrivé en plein été chez Relapse Records après quatre albums chez les Français de Listenable Records. Pas rancunier le père McEntee qui s'était fait dégager du label au début des années 2000 parce que le death metal n'était plus à la mode. Le leader leur avait pourtant fait un doigt donneur sur les deux outros bruitistes de
Blasphemy. Maintenant que le style est revenu en force, tout le monde est à nouveau copain! Quelle bande d'hypocrites!
Bref, passons! J'attendais d'ailleurs avec une certaine impatience ce nouvel opus. Pourtant, on ne peut pas dire que les deux derniers disques m'avaient fait une grande impression. Du bon Incantation certes, dans la plus pure tradition du style, mais loin de ce que le groupe a fait de meilleur. Néanmoins, la sortie de ce
Profane Nexus m'émoustillait. Sans doute cette pochette brûlante d'Eliran Kantor, encore une fois au top. Ou mon respect éternel pour une formation qui, même si l'âge d'or est révolu depuis longtemps, me la fera toujours adorer et saliver à l'approche d'un nouveau méfait. Tout en ayant au fond de moi la certitude que le combo d'outre-Atlantique ne ferait pas beaucoup mieux que
Vanquish In Vengeance et
Dirges Of Elysium, au demeurant tout à fait convenables. Être fan n'empêche pas d'être lucide!
Car après maintes écoutes depuis des semaines, difficile de se leurrer.
Profane Nexus ne fait en effet pas mieux que ses deux grand frères. Il fait même moins bien. Je ne vais pas passer des lignes à décrire le style d'Incantation. Les Américains font la même chose depuis toujours. Du death metal sombre et evil à base de riffs sinistres en tremolo, d'harmoniques sifflées stridentes, de solos chaotiques et qui alterne les passages plus ou moins rapides, certains étant désormais blastouillés, et les séquences down-tempo à l'atmosphère doomy de fin du monde. Le tout sur une voix gutturale d'outre-tombe que maîtrise fort bien John McEntee, au micro depuis
Decimate Christendom (2004). Ce que l'on appelle aujourd'hui du death old-school, école américaine. Voilà ce que vous retrouverez à nouveau sur ce
Profane Nexus fidèle à la recette d'origine. Aucune réelle différence avec les autres, notamment les deux derniers, peut-être un poil plus de traces légèrement "thrashies" et de mini solos au vibrato auxquels l'invité Sonny Lombardozzi désormais membre officiel en remplacement d'Alex Bouks n'est sans doute pas étranger. L'instrumental samplé ou ces arpèges poisseux accompagnés de bruitages telluriques sur "Incorporeal Despair" restent les seules traces de "nouveauté", avec de grosses guillemets. On reste en terrain connu, bien au chaud et clairement, on s'y sent bien. Ce côté sans surprise n'a jamais été un problème pour un groupe que l'on glorifie pour son authenticité et son attachement à une forme pure de death metal. Ça fait toujours du bien d'écouter un nouvel album d'Incantation et ça ne change pas avec
Profane Nexus. Incantation fait du Incantation. On pourrait donc tous être contents, ce que la plupart ne manqueront pas d'être d'ailleurs. Mais mon sens critique ne peut pas s'empêcher de trouver cet album banal.
Vanquish In Vengeance et
Dirges Of Elysium l'étaient déjà au regard de la discographie d'Incantation. Ce
Profane Nexus se fait encore davantage anecdotique. Et donc moins bon. Moins inspiré. Ennuyeux même par moment. Ça commençait pourtant pas mal sur "Muse", bien bourrin, avec toujours cette ambiance noire et soufrée que l'on vénère. "Rites Of The Locust" et "Visceral Hexahedron" continuent de donner des signes de vigueur.
Profane Nexus s'annonce cool. Ultra classique comme attendu mais costaud, comme les derniers albums. C'est à partir du fantomatique "The Horns Of Gefrin" où il n'y a rien à retenir que les choses se gâtent. Bien trop quelconque pour du Incantation! "Incorporeal Despair", un des titres les plus abyssaux (na bisso) du combo viendra remonter la pente, notamment grâce à ses petites touches "fraîches" évoquées plus haut avant que l'ennui revienne sur "Xipe Totec", morceau expéditif d'une minute. Le "Blissful Bloodshower" de
Profane Nexus, en nettement moins marquant. "Lus Sepulcri" se fait tout aussi transparent, lui sur plus de quatre minutes. Pas mauvais, j'insiste bien là-dessus, mais merde, c'est Incantation quoi, ils ont su faire tellement mieux! On dirait un de ces milliers de groupes souvent quelconques qu'ils ont influencés! Autant dire que l'interlude samplé "Stormgate Convulsions From The Thunderous Shores Of Infernal Realms Beyond The Grace Of God" ne brille que par son titre à rallonge. Une piste minimaliste placée pour accentuer l'atmosphère oppressante angoissante qui s'avère surtout inutile. L'ambiance est déjà là, pas besoin d'en rajouter! Par chance, la fin de l'opus se montre plus inspirée entre "Messiah Nostrum" qui joue bien sur l'alternance bourrin/plombé en offrant surtout de bons riffs et de bonnes mélodies dark, "Omens To The Altar Of Onyx", malgré le manque d'evilness, bien old-school avec un petit côté Asphyx pas déplaisant, et "Ancient Arise" qui clôt l'album sur une note doom bienvenue grâce à cette mélodie triste lancinante, même si le titre traîne trop en longueur. Il s'agit toutefois d'une nouvelle preuve qu'Incantation se débrouille désormais mieux dans le doom/death que dans le death de bouc qui bourre.
Me voilà donc forcément un peu déçu par un de mes groupes préférés. J'ai bien conscience depuis déjà un moment qu'Incantation ne retrouvera jamais le niveau de
Onward To Golgotha,
Mortal Throne Of Nazarene,
Diabolical Conquest ou plus récemment
Blasphemy. Le groupe continuait cependant de sortir des albums méritants qui ne faisaient pas tâche dans sa longue discographie. Pas que
Profane Nexus fasse vraiment tâche lui, n'exagérons rien, mais il se place sans doute comme l'album le plus faible qu'ait jamais composé la formation. Je n'irai pas jusqu'à dire mauvais car Incantation en est incapable, mais passable, oui. Trop de riffs génériques, de micros solos sans intérêt. Les morceaux sont courts, peu développés, vite expédiés, peu passionnants. Si ça passe toujours car Incantation reste Incantation, avec ce petit truc dans l'écriture et cette aura légendaire protectrice, son death metal autrefois impérial, conquérant et diabolique se fait de plus en plus insignifiant et de moins en moins inspiré. On se consolera en se disant que les deux tiers des pistes restent corrects, que la production est nickel, que les passages doomy font bien frissonner, que ça bourre toujours comme il faut et que la passion reste intacte. Presque le plus important, au final, pour un groupe qui n'a plus rien à prouver et auquel je resterai profondément attaché, quoiqu'il advienne.
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