Depuis la sortie du très bon
« Global Flatline » la bande à Sven de Caluwé a enfin retrouvé du poil de la bête, un sentiment conforté par le monstrueux et hyper-brutal
« The Necrotic Manifesto » qui a mis fin aux errements stylistiques de la fin des années 2000, et qui coïncide à un retour aux sources musical qui avait fait la notoriété des belges. D’ailleurs ça n’est sans doute pas anodin mais ce renouveau a coïncidé avec un changement total de personnel qui a été des plus bénéfiques et qui tient sur la durée, car autour de son chanteur on retrouve le bassiste JB Van Der Wal et le batteur Ken Bedene qui rempilent ici pour un troisième opus (un record !), et sont à ce moment-là les membres à être restés le plus longtemps dans le quintet. Finalement le seul mouvement est le départ pour raisons professionnelles du guitariste Danny Tunker, remplacé par l’américain Ian Jekelis (ex-ABIGAIL WILLIAMS, ex-ABYSMAL DAWN), qui n’influe en rien sur la vitalité et bonne santé actuelle du combo. Car hormis cette seule nouveauté pour le reste rien de nouveau, les gars (toujours signés chez Century Media) ayant ramené encore une fois pléthore d’invités sur ce nouveau chapitre puisqu’on y trouve Jason Keyser d’ORIGIN, Julien Truchan de BENIGHTED, ou encore David Davidson (REVOCATION) et Travis Ryan (CATTLE DECAPITATION, MURDER CONSTRUCT) qui viennent pousser la chansonnette, avec en prime comme d’habitude un visuel magnifique signé cette fois-ci de l’anglais Christopher Lovell qui a mis les petits plats dans les grands en dessinant la formation de façon superbe en la mettant en scène dans des passages tirées de classiques du cinéma fantastique (« S.O.S Fantômes », rebaptisé pour l’occasion « Gorebusters »), comme de l’horreur via un hommage appuyé à la série Z et à la Hammer.
Du coup musicalement ce nouveau ragoût de tripes reste dans la lignée de ses deux prédécesseurs avec toujours ce côté moderne un peu plus prononcé que par le passé, d’ailleurs après la charmante intro angoissante voilà que l’énorme « Retrogore » nous est balancé en pleine poire comme le « Hundred Hand Slap » d’Edmond Honda (les fans de « Street Fighter II » sauront de quoi ça parle). En effet si l’actuel marteleur montre depuis son intégration qu’il est une redoutable machine de guerre au niveau de la vitesse et de la précision on remarque qu’il va ici encore plus loin tant ses blasts sont ahurissants, cependant il offre également plus de diversité dans son jeu en n’hésitant pas à casser le rythme et à alourdir le tempo afin d’aérer l’ensemble le plus possible, même si la priorité reste donnée aux coups de mitraillette. Si cette entrée en matière se montre des plus raffinées c’est également grâce aux talents de la paire de guitaristes dont on remarque la cohésion entre les leads et les rythmiques avec des parties toujours plus alambiquées, quant au frontman historique on reconnait sans peine sa palette vocale toujours impeccable… bref on tient déjà un futur classique qui cartonnera sans peine sur les différentes scènes de concert. D’ailleurs outre la plus grande variété par rapport à son album de 2014, on remarque instantanément que d’autres morceaux font mouche et se démarquent du reste (alors que chez ce dernier l’ensemble était plus homogène), à l’instar de l’énorme « Whoremageddon » qui montre une technicité impressionnante tout en agrémentant le reste de parties de double surhumaine et d’un solo presque mélodique. Le tout étant mélangé avec des parties blastées et ultra-rapides disséminées un peu partout, histoire d’obtenir un résultat à la variété rarement entendue chez les gars. Même constat pour « Bit By Bit » qui sait devenir écrasant quand il le faut au milieu de cette tempête de fulgurances, où là-encore le frappeur nous sort un jeu tentaculaire où il montre qu’il sait aussi martyriser ses toms pour amener un léger côté tribal. Enfin « Coven Of Ignorance » est probablement le plus lourd de tout le disque car ici priorité aux parties mid-tempo et lourdes mises plus en avant, cependant on n’y perd pas en puissance et là encore l’osmose au sein des musiciens s’entend parfaitement vu qu’ils sortent là-encore toute leur palette technique ponctué de nombreuses cassures et variations.
Si le reste est de facture plus classique et habituelle ça reste quand même particulièrement délicieux et appréciable, à l’instar des réussis « Cadaverous Collection » et « The Mephitic Conundrum », ainsi que le très court « Forged For Decrepitude » qui ne débande quasiment pas et donne tout en moins de trois minutes (et dont la construction peut faire penser à « Hecatomb » de
« The Archaic Abattoir »). Cependant on ne peut pas s’empêcher d’avoir une légère impression de roue-libre par moments et une sensation de redite, mais il n’y a aucun passage faible ou ennuyeux et l’on reconnait direct le son et la patte de l’entité. Bref à l’instar de ses deux dernières livraisons ce cru 2016 d’ABORTED est un petit régal qui arrive encore à repousser encore plus loin les limites de la violence, de la technicité et de l’accroche, grâce à une alchimie totale et une cohésion sans failles, qui confirment que ce line-up est tout simplement le meilleur qu’ait connu son leader après plus de vingt ans d’activité. Porté en plus par une production surpuissante en béton armé il n’y a vraiment pas de quoi faire la fine bouche, tant l’ensemble nous montre que le combo est définitivement de retour aux affaires vu que ce nouveau volet de ses aventures se placera sans peine en haut de la pile d’une discographie désormais fort bien fournie, quantitativement et surtout qualitativement.
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