Mine de mine de crayon de bois, dans un peu plus d’un mois, c’est déjà le dixième album de Benighted qui verra le jour. Vingt-cinq ans d’existence tout de même ! Sans aller jusqu’à parler de vétérans, nos frenchies assument et assurent crânement depuis maintenant plusieurs années leur statut de tête de proue du métal extrême français avec une discographie qui enchaîne les sorties d’une qualité toujours remarquable quand bien même le style s’est acéré au fil du temps, délaissant quelque peu le côté death groovy de l’époque « I.C.P. » / « Identisick / Icon » pour accentuer la facette grindcore du combo (sans évoquer les débuts black, mais le but n’est pas ici de faire une biographie complète non plus). Bref, même si tout un chacun peut avoir ses affinités avec les albums du groupe (oui, je le redis ici j’ai toujours eu du mal à rentrer dans
« Necrobreed », la faute en partie à une prod bien trop sèche à mon goût et un mix bouffant un peu les guitares), les Stéphanois peuvent se targuer de n’avoir aucune sortie de route à déplorer en plus de vingt ans de carrière et ce n’est pas avec ce nouveau rejeton que ça va commencer, ô que non !
Suivant tranquillement son petit bonhomme de chemin en continuant d’explorer les pathologies mentales, le (désormais) quatuor repousse encore un peu plus loin ici les limites de son grind/death tant tout ici est
plus : plus brutal, plus technique, plus malsain…
Plus brutal ? Alors oui quand on en est arrivé à débattre sur l’album le plus brutal de Benighted on sait qu’on est déjà très haut sur l’échelle de la violence musicale mais je dois avouer que c’est probablement le cas. Je peux retourner la discographie du groupe dans tous les sens, je ne vois pas quel album pourrait se targuer de surpasser la violence totalement débridée qui se dégage d’« Ekbom ». Une intensité, une folie de tous les instants. Les vocaux de Julien semblent encore plus monstrueux qu’à l’accoutumée (c’est dire !) entre les
reeeee-reeeeee habituels, les porcinages en règle, un growl bien grassouillet et des cris d’écorché vif, c’est un véritable festival des horreurs auditives pour notre plus grand plaisir. Et que dire de la tartine que nous balance ce cher Mr Paradis ? Tartine, que dis-je, ce sont des parpaings à la tonne que l’on se prend en pleine poire. Vous allez bouffer du blast à n’en plus pouvoir, et du gravity aussi messieurs (« Nothing Left To Fear », « Flesh Against Flesh ») car Kevin est généreux ! C’est bien simple l’assise rythmique, également appuyée par la basse bien mordante de Pédro, est d’une intensité complètement folle. Rares (et brefs!) seront les moment d’
accalmie vous laissant le temps de respirer un coup, de retrouver vos esprits ou de vous éclater les cordes vocales (
meeeetaastaasiiiiis !!!). Une débauche de violence, une vraie boucherie !
Plus technique ? Oui car derrière ses fûts Kevin Paradis est certes une brute mais déployant une aisance technique tout simplement bluffante ! La rythmique est totalement épileptique et les patterns s’enchaînent à une vitesse supraluminique (une sorte d’effet Tcherenkov auditif en somme). Tout y passe (je ne vais pas vous faire la liste) avec une maîtrise incroyable. Chapeau bas ! Mais il n’est pas le seul à se faire plaisir, sur ce nouvel album la six-corde s’en donne aussi à cœur joie les riffs affûtés d’Emmanuel Dalle étant bien souvent agrémentés de gimmicks plus techniques absolument jouissifs (« Scars », « Nothing Left To Fear », « Metastasis » avec même un petit solo pas dégueu, « Flesh Against Flesh ») nous montrant toute l’étendue du talent du bonhomme, là encore un sacré boulot.
Plus malsain ? Oui encore une fois. Quand bien même ses prédécesseurs ne respiraient pas la joie de vivre et la sanité d’esprit, l’ambiance d’« Ekbom » dégage quelque chose d’encore plus sombre, limite dérangeant par moment et ce dès l’intro « Prodrome » (et sa petite mélodie malsaine reprise sur « Scars »). On va bien évidemment reparler ici de Julien tant sa prestation est hallucinante, ses vocaux totalement possédés, les bruits presque malaisants (on est loin de l’ASMR là!). Le sympathique frontman a ici une fois de plus repoussé les limites de son art. Tout bonnement impressionnant. La thématique choisie cette fois-ci par notre I.D.E. préféré, le syndrome du même nom, illustré à merveille par Róbert Borbás, lui offrant une nouvelle fois un terrain de jeu parfait. Les déviances guitaristiques dissonantes n’y sont pas non plus étrangères (toutes ces petits coups de rasoir dans les aigus).
Dans toute cette ébullition frénétique, Benighted réserve encore évidemment quelques passages où retranspire le passé plus groovy du groupe (« Le Vice Des Entrailles » à 41’’, « Nothing Left To Fear » à 1’16, le début du titre éponyme, de « A Reason For Treason », « Scapegoat »). Pas de soucis il reste de quoi bien s’éclater la nuque.
Difficile de trouver quoi que ce soit à redire ici tant ces douze titres ne souffrent d’aucun temps mort, c’est mandale sur mandale. Et comme si ça ne suffisait pas le groupe a cru bon de s’épauler d’Oliver (Archspire) et Xavier (Blockheads), respectivement sur « Nothing Left To Fear » et « Fame Of The Grotesque », pour venir écraser encore un peu plus nos esgourdes déjà en hémotympan. Et même quand il s’amuse à nous amadouer en baissant le tempo en mode rampant sur le début de « Mother Earth, Mother Whore » c’est pour mieux nous retourner comme une crêpe au bout d’à peine une minute trente pour un titre de clôture parfaitement à l’image de l’album, violent et malsain. Sans pitié !
Bon inutile de s’éterniser vous l’avez compris « Ekbom » est une tuerie sans nom. Aussi incroyable que cela puisse paraître, Benighted a réussi à repousser les frontières de sa musique encore un peu plus loin sur quasiment tous les plans. On ressort de ces trente-six minutes totalement coi, comme assommé par tant de violence et poussé à rappuyer sur
lecture dans une espèce de masochisme malsain. Avec sa superbe pochette, sa production abrasive et puissante, porté par quatre musiciens au meilleur de le forme et visiblement en osmose parfaite (j’avoue j’ai eu un peu peur avec ce passage au format quatuor), ce petit dernier de la fratrie Benighted restera une sortie marquante dans la discographie du groupe. La grosse claque de ce début d’année 2024 et indubitablement l’un des prétendants au podium en fin d’année.
P.S. : le syndrome d’Ekbom ou délire d'infestation parasitaire, est une pathologie rare, caractérisée par la conviction inébranlable d'avoir une peau infestée d'insectes ou de parasites. Le sujet se plaint d'un prurit persistant, avec la conviction inébranlable d'être infesté sur ou sous la peau. Il peut présenter des lésions cutanées à type d'ulcérations dues aux tentatives d'extraction et d'élimination de ces parasites.
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