Se taper, souvent à titre posthume, l’intégralité (ou presque) d’une discographie n’est jamais chose aisée. C’était déjà le cas avec Bolt Thrower, ça l’est encore avec Type O Negative dont je rechigne presque à faire les dernières chroniques qu’il me reste faute de savoir comment les aborder sans donner ni avoir la désagréable impression de me répéter inlassablement. Mais bon, ma dernière chronique sur le sujet (
October Rust) remontant à août 2014, j’ai bon espoir que ceux d’entre vous qui liront ces quelques lignes auront déjà oublié tout ou partie de mes écrits au sujet de cet emblématique groupe new-yorkais.
Quoi qu’il en soit, restons factuel.
World Coming Down est le cinquième album de Type O Negative sorti sur Roadrunner Records. Ce dernier voit le jour en 1999 et met en scène la ville de New-York depuis les berges du Brooklyn Bridge. Une vue imprenable sur Manhattan qui semble alors baignée dans un épais brouillard vert dont on distingue à peine les multiples gratte-ciels à commencer par ceux du World Trade Center aujourd’hui disparus. Quelques marqueurs visuels familiers (la couleur, la disposition du titre et du nom du groupe) comme pour mieux baliser le terrain. Oui, il s’agit bel et bien d’un album de Type O Negative. Pas de doute possible.
World Coming Down suit donc en toute logique les traces de son prédécesseur. Le groupe n’a d’ailleurs pas perdu son sens de l’humour à en croire "Skip It", titre d’introduction de quelques secondes qui donne l’impression d’un disque rayé. Comme pour
October Rust et le titre "Bad Ground", nombreux sont ceux qui ont dû retourner voir leur disquaire... Ce nouvel album vient également confirmer le subtil virage amorcé depuis
October Rust à savoir un désintérêt total du groupe envers ces quelques réminiscences Thrash/Hardcore largement perceptibles à l’époque de
Bloody Kisses. Un choix finalement assez naturel à l’écoute de ce
World Coming Down, album le plus Doom et mélodique de la discographie des new-yorkais. Pas de changement de cap à l’horizon mais une accentuation évidente de certains penchants à commencer par ces rythmes pesants toujours aussi sensuels. Le jeu de Johnny Kelly apparaît alors bien plus mesuré, à l’image de titres comme "White Slavery" ou "World Coming Down" dont les frappes tout en retenues, presque sporadiques sur certains passages, donnent l’impression d’une longue procession avançant péniblement dans un espace vide de tous repères. Mais le bonhomme à plus d’une corde à son arc et malgré une moyenne de BPM à rendre fou von_yaourt, force est de constater que son jeu n’en demeure pas moins toujours aussi personnel et original avec surtout ce qu’il faut de groove pour captiver l’auditeur. Quoi qu’il en soit, à l’exception du tubesque "Everything Dies" et du medley "Day Tripper" en hommage aux Beattles,
World Coming Down est plutôt du genre à trainer la patte sur un rythme funéraire de circonstance (d’ailleurs, à l’exception des interludes toujours assez dispensables, tous les titres font au moins six minutes).
Une atmosphère dépressive et moribonde que Type O Negative cultive à travers une approche toujours aussi personnelle, en premier lieu grâce à un son qui n’appartient qu’à lui, tout en distorsion. La basse de Peter Steele bien sûr mais aussi la guitare de Kenny Hickey (à l’exception cependant des quelques solos et autres arrangements discrets ici et là). Ensemble, elles apportent ce fameux côté chaud et rugueux devenus depuis déjà belle lurette la marque de fabrique d’un Type O Negative au grain irrésistible. Le rôle de Josh Silver n'est pas à oublier lui non plus. Ses nappes de clavier offrent ainsi un panel de couleurs discrètes et multiples à cet album, jouant bien entendu principalement la carte Doom ténébreux et dépressif mais en y apportant néanmoins d'autres éléments plus variés que ce soit dans les samples ou les sonorités (je pense par exemple à ce côté hindou sur "World Coming Down" même s'il y en à d'autres).
Quant aux compositions en elles-mêmes, pas de surprise si ce n’est le point évoqué dans le paragraphe ci-dessus. Titres à géométrie variable et aux idées multiples, les morceaux de ce nouvel album nécessiteront toujours un peu de temps et d’écoutes avant d’être appréhender, principalement à cause de leur durée. Néanmoins, il est juste de dire que le groupe semble avoir rendu les choses plus faciles. Est-ce le rythme plus "posé" de ces compositions qui en est la cause? Ces quelques passages plus lumineux? Ou bien encore ces mélodies sombres parfois un peu sucrées devenues trop accessibles? Peut-être. Toujours est-il que
World Coming Down s’assimile selon moi plus facilement qu’un disque comme
October Rust ou même
Bloody Kisses en dépit de ses quelques tubes. Car oui, cet album se veut particulièrement mélodique et pas besoin de le retourner dans tous les sens pour s’en rendre compte. Des mélodies parfois aguicheuses et faciles ("Everything Dies", "Pyretta Blaze", "Day Tripper (Medley)") mais le plus souvent extrêmement sombres et désabusées ("White Slavery", "Everyone I Love Is Dead", "World Coming Down"...). Une atmosphère dépressive et toujours aussi cynique qui en dit long sur l’état d’esprit d’un Type O Negative probablement au sommet de sa notoriété en cette année 1999.
Cette impression de non-retour émotionnel passe aussi par la voix suave et sexuelle d’un Peter Steele toujours aussi charismatique et virile malgré des paroles beaucoup moins portées sur le sexe. Il est ici davantage question de la Mort, des proches qui disparaissent ("Everyone I Love Is Dead", "Everything Dies"), de la drogue ("White Slavery", "Who Will Save The Sane?") et du non-respect de soi-même ("World Coming Down"). Des thèmes déjà abordés par Type O Negative par le passé mais qui prennent ici davantage d’importance.
World Coming Down s’inscrit en toute logique dans la droite lignée de ses prédécesseurs même s’il se révèle presque imperceptiblement différent, que ce soit musicalement ou bien dans les thèmes abordées ou plutôt non-abordés (le sexe, en filigrane ici). Il y a dans ce disque beaucoup moins de légèreté qu’auparavant. Cela se ressent sur le rythme, plus lent, plus morne, plus lourd mais aussi dans les mélodies qui ont perdu presque toute trace de frivolité gagnant de fait en noirceur. Bref, je crois avoir tout dit, j’en ai chié... On se retrouve dans six mois minimum pour la suite. D'ici là, bisous sanglant.
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