C'est avec la candeur du jeune jouvenceau multipliant les expériences sensorielles que je découvre le niveau de qualité des sorties estampillées Crepulsculo Negro. Dans ce genre de groupuscules, il est souvent coutume de trouver une ou deux formations dominant la masse et faisant passer le reste pour des projets nettement moins intéressants. Et ce qui est remarquable chez le Black Twilight Circle, c'est que c'est complètement l'inverse. Si deux ou trois groupes semblent plus « populaires » que les autres (Volahn et Arizmenda en tête), le reste n'a pas a rougir de son talent. Et comme le collectif américano-mexicain adepte de l'anarcho-indigénisme est fier de son roster, il le prouve en sortant une compilation massive, sobrement – hum... – intitulée « Tliltic Tlapoyauak ». On notera d'ailleurs que ce très bel objet est disponible en version triple LP ou double CD par le biais de l'excellent label américain The Ajna Offensive.
On se retrouver nez-à-nez avec deux heures de Black pur et dur, dans le style traditionnel de la doublette Crepusculo / Rhinocervs, mixant allègrement thématiques héritées des civilisations pré-colombiennes et Black Metal parfois à la limite du Bestial ou du Crust. Il serait franchement laborieux de procéder par groupe comme je le fais habituellement pour les Splits sur cette compilation somme toute gargantuesque. Contentons-nous de dire que les principaux grands noms sont présents, avec Volahn, Axeman, Arizmenda, BHL, Kuxan Suum, Tukaaria ou encore Shataan. Chacun y va d'ailleurs de sa petite composition dans son style propre. C'est d'ailleurs Kuxaan Suum qui a la lourde tache d'ouvrir le feu, en proposant un titre à tiroir de onze minutes, intitulé « Tzolk'in » qui propose son lot d'ambiance méso-américaines à la flûte. De quoi vous mettre dans le feu de l'action sans préavis...
Il est d'ailleurs assez amusant de constater le contraste présent tout au long de cette compilation qui oscille entre décharges de bestialité et titres progressifs, à la limite du psychédélisme. Un titre comme celui proposé par The Hauting Presence ne dépareillerait pas sur une compilation de Beherit ou d'Archgoat. Il est de même avec certaines formations comme BHL ou encore Acualli qui tapent là où ça fait mal, néanmoins ma préférence dans ce registre va tout de même à ce « Dead Souls Screams » efficace, burné et groovy en diable. Mais à côté de ça, certaines formations comme Kuxaan Suum, Cempopoloah ou Arizmenda nous livrent des titres étendus en longueur, proposant des atmosphères travaillées, ralentissements et passages ethniques bien sentis. Enfin, certains groupes offrent quant à eux des titres directement inspirés du Black Metal classique : on citera en guise d'exemple Tukaaria, Dolorvotre, Volahn ou encore In Lakech Ala Kin avec son très bon « Ometeotl » gorgé d'émotions et rappelant à notre bon souvenir les meilleures heures des démos de Black Norvégien. D'ailleurs, un groupe résume bien ces trois influences, puisqu'elles sont mélangées au sein de son titre, il s'agit de Muknal qui fait le lien entre Black Bestial et claviers psychés disposés en plein milieu.
Alors forcément, vous devez vous dire qu'avec un tel micmac de sous-genre et d'influences, la cohérence doit en prendre un coup. Et bien pas du tout puisque deux détails permettent au collectif d'éviter cet écueil. Le premier est somme toute évident - je l'avais déjà évoqué dans
la chronique du split Tukaaria / Odz Manouk - : il s'agit de la ligne idéologique et graphique du Crepusculo Negro. Même si les groupes pratiquent des genres différents, ils sont indubitablement sur la même longueur d'ondes et servent le même but : la réhabilitation des cultures oubliées. Que ce soit par la rage, l'émotion ou la mise en place d'ambiances propices, on ressent chez toutes les formations cette envie de rendre hommage, cette sincérité palpable et habitée. Or, n'importe quel amateur le sait, s'il y a bien une caractéristique morale qui permet de produire un bon Black Metal, c'est la sincérité. Et ce qui est sûr, c'est qu'elle est officiellement un membre à part entière du Black Twilight Circle.
Le deuxième point positif de cette compilation a aussi à voir avec la cohérence du propos. Il s'agit de la production – encore une fois supervisée par Arthur Rizk – qui offre un rendu idéal pour chaque groupe tout en assurant une ligne directrice qui sévira tout au long de la compilation. Au programme un son on-ne-peut-plus-analogique qui privilégie la chaleur des instruments, avec une basse grondante, des guitares grasses et rondouillardes, une voix bourrée d'échos et une batterie qui se fond dans le décor. Un choix qui sert tout particulièrement la musique des différents groupes puisqu'il s'adapte aussi bien aux titres violents qu'à ceux qui sont plus portés sur la subtilité. Même si c'est très « raw », on ne peut pas dire que c'est du foutage de gueule. Le Crepusculo Negro assume et revendique son sérieux en studio et c'est effectivement quelque chose que l'on ne peut pas nier à l'écoute de ce « Tliltic Tlapoyauak » au rendu abrupt mais sachant rester professionnel.
À n'en point douter, « Tliltic Tlapoyauak » est une compilation qu'on ne peut pas qualifier d'inégale tant toutes les formations présentes ici maîtrisent leur sujet. Si l'objet n'est pas forcément très digeste, principalement à cause de ses deux heures de musique, il reste une porte d'entrée vers l'univers si particulier de ces chicanos décidément très inspirés. On pourra d'ailleurs choisir de s'enfiler la compilation d'un trait comme un maniaque ou de faire son tri entre les différentes formations. L'accessibilité de cette compilation est d'ailleurs son atout majeur puisqu'elle est relativement facile à se procurer et ce dans plusieurs formats. Amateurs et curieux, entre vous et le Black Twilight Circle, il n'y a désormais qu'un pas qui n'a jamais été aussi facile à franchir.
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