Live at Last est l'un des rares témoignages de ce qu'était un concert de BLACK SABBATH dans les années 70. Constitué d'extraits de concerts captés le
11 mars 1973 au Free Trade Hall de Manchester et le
16 mars 1973 au Rainbow Theatre de Londres, le disque live aurait dû sortir courant 1973 mais le groupe, jugeant les rush peu convaincants, renonça finalement au projet. Ce n'est que sept ans plus tard que les enregistrements sont exhumés dans des circonstances très particulières et sans l'accord du groupe. Le coupable de ce mauvais coup c'est
Patrick Meehan, l'ex-manager de BLACK SABBATH et propriétaire légal des bandes de 1973.
Cet ancien collaborateur de
Don Arden a pris en main la destinée du groupe de 1971 à 1975, contribuant à propulser BLACK SABBATH bien plus haut et loin que son prédécesseur,
Jim Simpson. Quatre années de succès, d'argent coulant à flot, de drogue, de scène et de travail. L'ère Meehan c'est l'âge d'or du Sab, celle de
Master Of Reality, Vol.4, Sabbath Bloody Sabbath. Le revers de la médaille, les quatre anglais l'ont découvert un peu tard, c'est que dans tout bon manager se cache une crapule sans foi ni loi. Patrick Meehan a financé les quatre artistes rubis sur l'ongle mais en contrepartie (et bien sûr sans les en avertir), il s'est attribué les droits sur leurs créations. Les procès pour récupérer leur dû occuperont les brummies durant toute la deuxième partie de la décennie 1970 et contribueront à saper leur moral, leur créativité et leur cohésion. Ozzy, Bill, Geezer et Tony ont fini par récupérer une grande partie des droits sur leurs œuvres mais certaines bandes sont restées entre les mains du manager.
Parmi celles-ci, les fameuses rush des concerts de 1973 que l'indélicat agent publie en 1980, pour surfer sur le succès remporté par
Heaven and Hell (sorti en avril 1980) et jouer sur les inquiétudes des fans suite à l'éviction d'Ozzy Osbourne. Tandis que BLACK SABBATH trouve un nouveau souffle grâce au remplacement de Ozzy par Ronnie James Dio, l'album
Live at Last vient jeter le trouble chez les fans au grand désarroi de BLACK SABBATH mais également de Ozzy Osbourne dont le debut album solo (
Blizzard of Ozz parait à peine une mois après la sortie du
Live At Last.
Bien qu'il n'ait jamais été officiellement reconnu comme un album original de BLACK SABBATH,
Live At Last demeure un témoignage essentiel pour tout fan de la formation de Birmingham : c'est un live presque complet enregistré pendant l'âge d'or du Sab, à une époque où le groupe est encore en pleine ascension. Il comporte tous les éléments d'un live du Sab de cette époque et qui ont disparu depuis. Il y a notamment ce long, très long instru de "Wicked World" ponctué par une impro de Ozzy chargée de feeling. Outre cette petite perle, le live met en lumière le Ozzy Osbourne des années 70 et il n'a pas grand chose à voir avec le Ozzy Osbourne des années 2000. Le chanteur est beaucoup plus dynamique, naturel et touchant que la caricature qu'est devenu le Madman avec ses running gag moisis (le coucou) et ses gimmick épuisants (on lève les bras, on les remue de droite à gauche, on applaudit le batteur).
L'autre différence de taille par rapport aux derniers concerts de BLACK SABBATH (c'est à dire tous les concerts donné par le groupe depuis le live
Reunion de 1998 jusqu'aux ultimes sets de la tournée
THE END) c'est la setlist. Si elle contient déjà les morceaux signatures inamovibles que sont "War Pig
", "Paranoid" et "Children Of The Grave", on y trouve également quelques petites perles rarissimes en concert comme ce fameux "Wicked World" de dix huit minutes ou "Killing Yourself to Live" comme un avant-goût de
Sabbath Bloody Sabbath. Le concert atteint presque une heure car la plupart des morceaux sont étirés avec des instrus inédits. Certaines chansons bénéficient d'une interprétation alternative à la version studio, notamment "War Pigs" et "Paranoïd". Comme tout live qui se respecte, le public est bien audible et vivant.
Enfin, le disque se distingue par un mixage très naturel. A l'époque de sa sortie, Patrick Meehan à bossé à l'économie et ne s'est pas fendu d'une prod de concours mais ce travail à l'arrache donne à la galette un grain naturel d'époque beaucoup plus séduisant que le son artificiel et surmixé du
Live Evil publié deux ans plus tard par un BLACK SABBATH soucieux d'offrir un concurrent officiel et "de poids" à cet horrible bootleg qu'est
Live At Last. Notons enfin que les pistes de
Live At Last ont été réunies et enrichies d'extraits supplémentaires dans l'album
Past Lives publié, cette fois-ci officiellement par le groupe, en 2002.
nb : les extraits live que j'ai associés ne sont pas issu des concerts de 1973 ayant servi à l'album
Live At Last mais je trouve qu'ils restituent bien ce qu'était le BLACK SABBATH de cette époque, un BLACK SABBATH qui n'a vraiment pas grand chose à voir avec l'image que le gang a développé à partir du début des années 1980.
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