Je me méfie de la beauté, qu'elle se trouve dans les choses ou dans les gens. Elle a tendance à être une traîtresse avec moi, à faire taire mon esprit critique, les doutes qui me servent à faire les meilleurs choix, à me prendre en entier et s'en aller comme elle est venue, inaccessible, me laissant un goût de tromperie en bouche. La beauté, ce mirage, que je me fatigue à poursuivre et suis fatigué de suivre, dans les choses ou dans les gens.
Donc, quand je rencontre un album aussi incroyablement beau que celui-ci, je me méfie. Beaucoup. Surtout quand ce dernier coche toutes les cases de la rencontre marquante. Pensez, un groupe que je n'avais plus écouté depuis longtemps – bien que je considère
New Dark Age comme un moment important dans ma formation en Doom Metal (obtenue sans mention, restons modeste) – et qui me subjugue à nouveau le long de quarante-six minutes, certes pas si nouvelles pour qui aura écumé la démo
To Sol a Thane que reprend et réarrange
White Horse Hill, il y a de quoi croire en un nouveau coup de foudre ! Et c'est ce qui s'est passé dès la première lancée de ce nouvel essai : coup de foudre en retrouvant un doom aussi pur, chevaleresque, noblesse du style et noblesse du cœur, cette noblesse qui pousse à vouloir la mériter ; coup de foudre avec la voix de Paul Kearns, qui n'a rien à envier à Morris Ingram, se permet même d'apporter ses nuances propres, braillant d'une voix d'or son autrefois, son ailleurs et son là-bas, jusqu'à envahir l'esprit d'une nostalgie fondante donnant le désir de le catapulter frère angélique et médiéval d'un certain
Alan Averill sans chipoter ; coup de foudre avec ces lignes inépuisables de feeling, rythme lent mais cœur fort, mélodies sans temps mort, les moments de calme émerveillant telle une languide session amoureuse, les instants tempétueux nous ahurissant à dos de cheval, guitares, batterie, basse et chant semblant dire en continu « ne regarde pas derrière toi l'ami, le meilleur est à venir ici »... Coup de foudre, en somme.
Je ne me laisserai pas avoir, cette fois ! Éberlué, je cherche la petite bête, celle qui ricane devant mon visage enthousiaste, attend l'heure où apparaître et gâcher la fête. Petite bête, es-tu dans cette répétition de « Beheld, a Man of Straw » que l'on trouve sur « Under Waves Lie Our Dead » ? Te terres-tu dans cette durée, dont je trouverai à terme le plaisir trop court ? Ou peut-être es-tu dans ce simulacre qu'est l'apparence, belle au premier abord mais que les écoutes multiples finissent par montrer guindée, trop classique, trop facile, aguicheuse mais sans fond ? Impossible de te trouver, petite bête ! Tu es bien en vérité beauté : ton classicisme a la magnificence des légendes à lire au coin du feu, l'imaginaire pris dans une sensation où les histoires se mêlent à l'Histoire ; ta durée te va bien, donnant à ta lumière toute la latitude pour aveugler sans se diluer ; tes répétitions sont savoureuses car inlassables. Que puis-je trouver à reprocher à ce disque, qui ne change pas la donne d'une frise chronologique établie avant lui et qui sera encore maintes fois reprises, mais rarement avec le même talent ? Le doom metal épique est cela, sera toujours cela, ce battement régulier et nerveux où l'organe ne change pas d'un homme à un autre, seulement l'envie de batailler, d'atteindre son autrefois, son ailleurs et son là-bas en passant par son là-haut, en guise de différence fondamentale. Et
White Horse Hill, scolaire pour les uns, exemplaire pour les autres, le montre d'une façon qui ne s'étiole jamais, ne donne jamais à y redire.
Ai-je encore mon esprit ? Je reconnais que ces riffs ont des décennies derrière eux, qu'ils feront bailler ou rire ceux qui pensent que le doom est une question de tristesse, de noirceur, de blues avant d'être un vecteur – le meilleur – pour la mise en scène des émotions. Solstice, noble, altier, valeureux Solstice, fera bouder les amateurs d'exploration d'albums lents et lourds où la lampe frontale est conseillée. Rien de neuf en somme ! Juste une beauté inattaquable, conquérante, que je ne suis pas prêt d'arrêter de poursuivre. Tant pis, je me suis encore fait avoir...
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