Pierre angulaire de la scène Death Metal, Cannibal Corpse fait aujourd’hui figure de véritable patriarche et cela depuis déjà plusieurs années. Un statut pour le moins immuable sur lequel les aléas du quotidien, même les plus improbables, ne semblent pas avoir de prise. C’est pourquoi l’arrestation de Pat O’Brien fin 2018 pour des raisons absolument abracadabrantes (effraction, charge contre un représentant de l’ordre publique, possession massive d’armes à feu et de munitions...) n’a pas vraiment ébranlé le petit monde de l’underground, chacun sachant très bien que le reste du groupe ne manquerait pas d’aller de l’avant comme si de rien n’était. Et c’est évidemment ce que Cannibal Corpse à fait, souhaitant bon vent à son ancien guitariste tout en faisant les yeux doux à un certain Erik Rutan officiellement intronisé chez les Floridiens en février dernier.
Il aura donc fallu trois ans et demi aux Américains pour donner une suite au fort sympathique
Red Before Black paru en octobre 2017. Un laps de temps un tout petit peu plus long que ce à quoi George Fisher et ses acolytes nous ont habitués depuis la sortie de leur premier album en 1990 et qui très certainement s'explique par cet épisode O’Brien ainsi que par cette période particulière que nous traversons actuellement. Quoi qu’il en soit, Cannibal Corpse est aujourd’hui bel et bien de retour. Et une chose est sûre, le groupe n’est pas là pour enfiler des perles...
Sans surprise, c’est Vincent Locke qui signe une fois de plus l’artwork de ce quinzième album intitulé
Violence Unimagined. Une oeuvre plutôt réussie, en tout cas bien plus que celle de son prédécesseur qui laissait quand même sérieusement à désirer pour un groupe de cette envergure. Mention spéciale pour cet artwork non-censuré particulièrement dégueulasse (petit clin d’œil aux jeunes parents qui liront ces lignes et iront assouvir leur curiosité morbide) que l’on a peu de chance de voir en tête de gondoles dans les rayons de la Fnac ou d’ailleurs. Côté production, c’est là encore sans surprise que l’on retrouve Erik Rutan derrière la console pour un résultat équilibré et de très bonne facture qui s'inscrit dans la continué de ce qu’il a pu faire pour le groupe par le passé, notamment sur leur précédent album.
Vous l’aurez donc probablement déjà compris, malgré l’arrivée de sang neuf au sein de la formation de Tampa, Cannibal Corpse reste une fois encore particulièrement fidèle à sa formule et ce n’est probablement pas demain la veille qu’il en déviera. Comme
Red Before Black avant lui, ce nouvel album enchaîne ainsi les bourre-pifs Death / Thrash sans vraiment se soucier d’apporter ne serait-ce qu’un soupçon de fraîcheur à une recette que le groupe maitrise sur le bout des doigts depuis déjà un paquet d’années... Conduit avec cette rage sanguinaire qui caractérise chaque album du groupe,
Violence Unimagined va s’articuler autour de schémas plus ou moins identiques et bien connus des amateurs de Canniboul avec pour l'essentiel ces accélérations sauvages et frénétiques auxquelles vont se succéder ces ralentissements dont la formation à le secret, le tout servi par des riffs plus ou moins tarabiscotés. Une formule qui a fait ses preuves et que le groupe continue d’appliquer à la lettre avec un talent évident et une aisance toujours aussi déconcertante.
Face à cette absence de prise de risques à laquelle nous sommes évidemment habitués, devons-nous pour autant bouder notre plaisir ? Non, absolument pas. Si vous êtes en paix avec l’idée de bouffer le même genre de Death Metal album après album,
Violence Unimagined recèle de véritables bons moments qui prouvent à ceux qui en doutaient encore qu’après trente-trois ans de carrière, Cannibal Corpse en a encore largement sous le pied. S’il y a bien quelques séquences un poil moins marquantes (notamment lorsque le groupe baisse la cadence sur des titres comme "Surround, Kill, Devour", "Follow The Blood" ou "Slowly Sawn"), l’essentiel de l’album est mené à un tel rythme qu’il va satisfaire une fois de plus à tous nos instincts les plus primitifs. Une satisfaction animale et immédiate qui ne laisse que très peu de place à la réflexion. Comment dès lors ne pas se taper la tête contre les murs à l’écoute de titres comme "Murderous Rampage", "Necrogenic Resurrection", "Inhumane Harvest", "Condemnation Contagion", "Ritual Annihilation" ou "Overtorture" ? Entre ces riffs éclairs balancés à toute berzingue, ces enchevêtrements de riffs plus ou moins complexes, cette batterie particulièrement dynamique, ces quelques solos plutôt inspirés (bienvenue à monsieur Rutan à qui l’on doit trois titres sur l’album), ce groove bovin et brise-nuque toujours aussi irrésistible ou ce bon vieux growl infatigable débité à une vitesse hallucinante, Cannibal Corpse a beau se contenter de faire du Cannibal Corpse, il faudrait être sourd pour ne pas prendre son pied ici. Oui, ce que les titres ont gagnés en immédiateté ils l’ont perdu en technique (malgré une niveau tout à fait acceptable, les titres à la sauce "Frantic Disembowelment", "The Cryptic Stench" ou "Pounded Into Dust" se font rares désormais) mais force est de constater qu’il n’y strictement rien à reprocher à Cannibal Corpse sur la question de l’efficacité. Car en dépit une certaine redondance dans son propos et un petit côté un petit peu plus "facile", s’il y a bien une chose qui qualifie encore aujourd’hui les Américains, c’est bien cette capacité à jouer (et croyez moi, le groupe est loin de faire semblant) et composer des morceaux particulièrement intenses et sauvages d’une pertinence capable de défier le temps qui passe.
Malgré les années qui passent (ou plutôt les décennies), il est clair que celles-ci ne semblent pas avoir beaucoup d’impact sur Cannibal Corpse qui continue d’enchaîner les albums à un rythme pour le moins soutenu. Surtout, sans évidemment réussir à égaler ces premiers albums rapidement devenus cultes et incontournables, ces récentes productions n’ont pas vraiment à rougir de quoi que soit. Certes, ce n’est pas aussi technique que cela ne l’a été, certes la formule peut paraître réchauffée, certes il y a un peu plus de facilité qu’avant mais après quinze albums, qui n’aurait pas perdu un peu de sa superbe et de son attrait ? Cannibal Corpse conserve pourtant une certaine flamboyance qui en fait encore de nos jours l’une des formations les plus solides dans le milieu. Et il suffit de voir le groupe sur scène (et les réactions particulièrement musclées du public) pour comprendre à quel point ce statut est tout sauf galvaudé. Avec
Violence Unimagined, Cannibal Corpse poursuit son chemin sans s’arrêter et il faut croire que cela lui réussit plutôt bien.
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