Dread Sovereign - Alchemical Warfaire
Chronique
Dread Sovereign Alchemical Warfaire
L’une des grande tendance des années deux mille dix aura été la redécouverte du doom metal traditionnel et des vieux groupes de heavy metal plus ou moins obscurs de la fin des années soixante dix et du début des années quatre vingt par une multitude de musiciens venant de la scène black metal, avec parfois des réécritures de leurs hagiographies pour certains musiciens. Allan Nemtheanga fait partie de cette lignée de musiciens qui ont mis en avant cet amour pour ces vieilles gloires et influences, d’abord avec cette formation éphémère que fut Twilight of the Gods, hommage à Bathory avant de sortir un album assez sympathique en deux mille treize. C’est cette même année qu’il lança son projet de doom metal, le dénommé Dread Sovereign où il occupe la place de chanteur et de bassiste aux côté de son acolyte batteur de Primordial et du guitariste Bones, dont la seule carte de visite était alors le groupe de hard rock Wizards of Firetop Mount. Cela dit, ce ne fut pas la première incartade du leader de Primordial en territoire doom metal, puisqu’il avait chanté sur le sublime Human Antithesis de Void of Silence, et qu’il fut un temps pressenti pour être le chanteur de Solstice. Le trio sortit un EP, Pray to the Devil in Men en deux mille treize et un premier album pour le compte de Ván Records l’année suivante, l’excellent All Hell’s Martyrs. Trois années plus tard, le trio, qui vit son seul changement de musicien avec l’arrivée de Con Ri aux baguettes, - Altar of Plagues, Malthusian -, sortit For Doom the Bell Tolls. Cette année deux mille vingt et un voit donc la sortie de leur troisième album, le premier pour le compte de Metal Blade, le présent Alchemical Warfare. L’on reprend les mêmes et l’on recommence avec cet album?
Pour couper court à tout suspense, l’on peut déjà dire que ce nouvel album est bien plus plaisant que son prédécesseur, qui m’avait bien laissé sur ma faim. Pourtant, la formule n’a pas vraiment changé puisque l’on retrouve ce heavy doom metal qui fait autant la part belle aux influences doom traditionnel du trio que celles venant du vieux heavy metal du début des années quatre vingt, et je ne peux notamment m’empêcher de penser à Angel Witch. Il faudra donc s’attendre sur ce Alchemical Warfare à quelque chose de non univoque au niveau des tempi, et c’est peut être même ce qui démarque cet album des précédents. L’on navigue entre passages bien lents, comme sur l’introduction de She Wolves of the Savage Season, que d’autres plus mid tempo, et d’autres bien rapides, je pense à la première partie de Nature is the Devil’s Church. Mais il faut garder à l’esprit que chaque titre voit une belle alternance des tempi ce qui rend l’ensemble non redondant et surtout assez explosif. Et c’est ce côté qui m’avait séduit à l’époque des deux premiers enregistrements, et que l’on retrouvait moins sur For Doom the Bell Tolls. Là-dessus, rien à dire c’est vraiment bien fait et ça apporte une certaine fraicheur à l’ensemble. C’est assez paradoxal, car rien n’est vraiment neuf sur cet album, mais c’est clairement bien fait. Bien fait, parce que le trio y adjoint des influences qui viennent aussi bien d’un groupe comme Venom, dans ce côté bien maléfique et un peu rock’n roll, tant dans les paroles, que dans le rendu, à l’image de cette très belle pochette réalisée par le talentueux Costin Chioreanu, avec un soupçon d’influences provenant des premiers Bathory, avec quelques relents thrashy dans certains riffs. Pour ainsi dire, cela sent bien le souffre même s’il y a moins cette ambiance médiévale des débuts. Mais ce qui reste la marque de fabrique et surtout la force de frappe de Dread Sovereign c’est cette capacité à proposer des moment bien rageurs et bien intenses. Chaque titre en présente au moins un, et l’on saluera sur les titres les plus allongés cette façon de faire monter la sauce avant que tout ceci n’éclate à la face de l’auditeur.
Certes, beaucoup de formations se sont essayées dernièrement à ce type de mixture, mais il faut avouer qu’ici cela prend vraiment forme et clairement sens. Et il y a de quoi ravir l’auditeur entre des titres plus longs et un peu lancinants et des brulots tels que Devil’s Bane et son refrain ultra accrocheur. Il faut dire que ce coup-ci, il n’y a pas de déchets dans les compositions et l’on a toujours ces introductions et interludes aux claviers, tenus par le frère de Nemtheanga. Évidemment, pour ce qui est des qualités des Irlandais, c’est un peu facile avec un tel chanteur en la personne de Nemtheanga. Il fait encore des merveilles avec son chant clair qui sonne en même temp extrême, dans l’intensité qu’il y met, même s’il a ici une coloration bien plus metal, en tant que frontman d’une formation attachée à ses nobles racines, et moins dans l’émotion comme l’on a l’habitude avec Primordial. Et puis, il se permet des incartades dans un registre haut perché de temps à autres, ce qui n’est pas pour me déplaire. Il ne démérite pas pour ce qui est de la basse, sa BC Rich étant bien mise à l’honneur et l’on est loin des simples lignes de basse. Il n’est pourtant pas la seule attraction de cet album car Bones est un sacré guitariste. Il n’y a pas que ses riffs qui émerveillent, il y a surtout son travail en tant que soliste et où l’on sent bien toute l’inspiration qu’il tient, avec toujours ce côté incandescent et explosif. Le tout baigne dans le jus d’une excellente production au son cradingue et puissant comme on l’aime et qui sied tellement bien à ces huit compositions et cette reprise de Bathory en fin de parcours.
Alchemical Warfare est pour moi une belle réussite et la confirmation de ce que Dread Sovereign avait accompli sur All Hell’s Martyrs et que l’on n’avait malheureusement pas trop vu sur For Doom the Bell Tolls, sans pour autant faire du surplace. J’avoue que je n’en attendais pas grand chose, même en ayant écouté le premier extrait, Nature is the Devil’s Church, à la fin de l’année dernière, et pour le coup cela a été une belle surprise. Évidemment, il n’y a rien de neuf sur cet album, encore que la manière d’agencer les choses et de combiner avec autant de talents toutes ces influences ne sont pas si communes que cela de nos jours. Dans tous les cas, l’on a ici une belle œuvre de heavy/doom metal à l’ancienne, vraiment bien faite et séduisante et qui aura de quoi séduire tout amateur des genres évoqués plus haut, avec ce délicieux petit côté maléfique et prenant qui ne font qu’augmenter l’intérêt que l’on puit porter à cet album. Dans tous les cas, Dread Sovereign a franchi allègrement le cap du troisième album, en espérant que ce changement de label puisse apporter à cette formation une bien meilleure médiatisation et une reconnaissance bien méritée.
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