Que peut-il y avoir de pire pour un groupe à chanteuse que de perdre sa chanteuse ? A mon avis pas grand chose. Pour la plupart des formations dans cette fâcheuse situation qui tentent de s'en remettre, cela débouche sur la recherche d'une nouvelle icone et souvent sur un album très très moyen. Les exemples ne manquent pas évidemment, de The Gathering à Nightwish en passant par Flowing Tears ou encore Elis (à non c'était déjà pas terrible avant ça). Malheureusement pour Tristania qui avait su se relever du départ de Morton Veland (leur principal compositeur) en 2000, Vibeke Stene a décidé d'aller voir ailleurs après la sortie du prometteur
"Illumination" et elle n'est pas la seule puisqu'en 3 ans, le groupe a perdu pas moins de 5 de ses 7 membres. Anders H. Hidle et Einar Moen, seuls rescapés ont dû quasiment refonder un groupe et se devait d'assurer avec un sixième album qui saurait maintenir l'intérêt des fans pour ce projet. Pas facile dans ces conditions de garder la tête froide et de ne pas céder au chant des sirènes... et "Rubicon" parle tristement de lui-même.
1. La bombe
Après un tel revers, on peut choisir de trouver une chanteuse dont la voix s'approche de l'ancienne ou trouver une toute autre voix. Et dans les 2 cas, on peut choisir une chanteuse agréable à regarder ou non car vu le nombre de chanteuses talentueuses, c'est bel et bien un choix. Qui leur jettera la pierre d'avoir recruté la pulpeuse Mariangela Demurtas ? Après tout, il n'y a pas de mal à se faire du bien, c'est quand même plus sympa que de se trimbaler un thon en tournée. Mais là où le bas blesse, c'est qu'on est loin de la puissance et de l'intensité vocale de Vibeke pour une chanteuse qui se place dans un répertoire pas si lointain. Alors pourquoi elle ? Ce petit regard coquin qu'elle nous jette sur l'artwork en dirait-il long sur les sournoises intentions du groupe ? Je dis ça, je dis rien moi.
2. La star
Quitte à refaire un line-up, autant se faire plaisir et piocher dans les valeurs sûres. Alors pour donner un peu de crédibilité à ce retour, Tristania s'est entouré notamment de Kjetil Nordhus qui avait déjà fait des merveilles chez Trail Of Tears (voir la chronique de "Existentia"), ce dernier étant visiblement friand de metal gothique et en manque d'un emploi stable après le split de Green Carnation. Et un bon chanteur, ça ne sera pas de trop pour donner un coup de main à la petite Mary qui ne peut pas tout faire non plus. Une certaine Gyri Smørdal Losnegaard (Octavia Sperati) a été également sélectionnée pour accompagner à la guitare, mais ça claque tout de suite moins.
3. La production
Et pour assurer aussi, avoir une bonne production peut s'avérer utile pour en mettre PLEIN LA GUEULE. Tristania l'a bien compris et s'est offert les services de Waldemar Sorychta pour le mixage et la production de son album. Cela signifie un gros son et des arrangements à n'en plus finir pour un résultat que le groupe n'a jamais pu atteindre jusqu'à présent. Il suffit de réécouter
"Illumination" pour s'en rendre compte. Tant mieux après tout, c'est toujours moins douloureux avec un peu de lubrifiant plutôt qu'à sec.
4. Le vieux pote
Et le plus beau dans tout ça, c'est sans conteste le retour en guest du petit Pete Johanson et de son violon qu'on n'avait pas entendu depuis
"World Of Glass", les plus belles heures de leur metal gothique symphonique. Difficile d'exprimer son désespoir d'une manière plus explicite que d'essayer de recréer la magie d'une époque totalement révolue. Ses apparitions son sporadiques mais le bougre n'a pas perdu la main. Dommage que ça ne soit pas le cas du groupe.
Alors comment croire en l'honnêteté d'une production aussi racoleuse que ce "Rubicon" ? Tout ici respire l'album fait pour plaire et uniquement pour plaire. C'est formaté, lisse, sans accroc, des structures simplistes aux refrains taillés pour la radio en passant par l'absolue domination du chant sur tout le reste. On croirait presque que Mary et Kjetil se livrent a une compétition stérile digne de la Star Academy tellement le groupe a mis l'accent sur ce duo de voix (j'aurais pu mettre "variété metal" à la place de metal gothique). Contrairement aux précédents albums, leur musique a perdu toute ambiance, toute profondeur au profit d'une série de pseudos "tubes" parfaitement illustrés par les quelques titres en écoute, "Year Of The Rat", "Exil" et "Sirens". Les seules choses qui restent à sauver, ce sont quelques bons riffs et passages plus incisifs où Anders parvient à imposer quelques hurlements, ainsi que certaines interventions de Kjetil qui n'en demeure pas moins un excellent chanteur.
Au final, "Rubicon" est une des plus grosses déceptions de cette année en ce qui me concerne. Alors que le groupe semblait revenir à son meilleur niveau, le voilà transformé en groupe de metal gothique de seconde zone, sans personnalité ni intérêt, à l'instar de son alter égo Sirenia. Passez donc votre chemin, ça n'en vaut pas la peine... à moins que vous n'ayez besoin d'écouter un peu de soupe car celle-ci quand même le mérite de s'écouter.
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