Novus Opiate Seclorum : ce titre parodié du grand sceau des Etats-Unis (Novus Order Seclorum = Un nouvel ordre pour cet âge, je vous laisse faire le glissement sémantique avec Opiate) est un des éléments appartenant au premier EP d'un des groupes qui allait devenir un des mastodontes du Metal moderne, j'ai nommé Tool. Je crois que peu de monde, en tout cas dans des contrées qui n'ont pas des frontières communes avec la Californie, a réellement découvert le groupe par cet EP. Ce dernier est composé de 4 titres studio, de 2 titres Live, et d'un titre caché, généralement appelé The Gaping Lotus Expérience, en raison d'un goût prononcé de Maynard James Keenan pour le papier toilette. Me demandez pas pourquoi, j'en sais rien.
Comme l'a dit le chanteur du groupe, Maynard James K., en interview un jour, ce premier EP était "un cri de rage primal". Alors qu'on ne se méprenne pas, ici, point de gutturalités porcines, de hurlements de hyène enrouée, ou de barrissements d'éléphant ténor basse, mais plutôt des montées d'adrénaline qui se terminent par des vociférations de colère ou d'amertume. Cette définition s'applique aussi à la durée et à la structure des chansons, beaucoup moins longues et torturées que dans
Aenima ou
Lateralus. D'où une sensation d'émotion plus brute, d'être en phase avec une espèce d'animalité, transmise surtout par la voix de Maynard, qui était déjà fort puissante à cette époque, de la batterie énorme de Danny Carey, qui s'en donne à cœur joie sur ses toms et les cymbales, un Adam Jones des grands jours, composant des riffs acérés, précis et compacts, supporté par la basse de Paul d'Amour à l'époque. Plongée au cœur de l'univers Toolien par Sweat, entrée en matière brute et directe, où Maynard donne déjà un aperçu de ce qui fera les qualités de son chant plus tard, des mélodies imparables, impeccablement posées ; ici les mélodies sont relativement simples, eu égard à la même simplicité des chansons, ce qui n'en est que plus efficace. L'intro de basse de Hush, qui en constitue le thème principal, suit ; cette chanson est une dénonciation sans équivoque de la censure ("People tell what to say, what to think and what to play…"), thème porté aussi par la vidéo faite à cette occasion, où l'on voit uniquement les membres du groupe nus à l'exception de panneaux 'Parental Advisory Explicit Lyrics' placés juste sur leurs quéquettes. Je sais à la limite, j'aurai pu utiliser le pudique "parties intimes", mais ça me fait plaisir de mettre le mot quéquette dans une chronique sur Tool (cherchez "Tool wrench" dans gogol images, et vous verrez mieux ce que je veux dire).
Donc, on se retrouve à "Part Of Me", qui est une des seules chansons que le groupe a conservé sur des setlist plus récentes, et qui est la plus entraînante je dirais, de ce court EP, avec un riff simple mais bougrement efficace, en dépit du rythme un peu bizarre, toujours sur des mesures en 37/18ème qui augurait déjà du goût pour les mesures décalées, héritées d'une addiction passée du guitariste pour Pink Floyd. Puis viennent 2 plages Live, ce qui peut paraître bizarre mais selon le groupe les versions Live rendaient mieux que les versions studio d'où ce choix. Et déjà l'humour froid et caustique, empreinte du chanteur est présent sur Cold & Ugly, où li déclare au public : "Throw this Bob Marley Wannabe motherfucker out here !" puisqu'un rasta un peu débile (pléonasme) s'amusait à faire hurler une trompe, avant que le groupe entame la chanson susdite, toujours aussi concentrée et âpre, et où Maynard réussit à faire passer sa colère et sa tristesse dans une palette d'émotions rarement aussi bien transmise. Les blagues continuent à fuser lors de la seconde performance :" You see a bunch of assholes who lived in this part of the building here. But we systematically remove them like any kind of termite or roach.", puisque cette chanson (Jerk-Off, la bien nommée) a été enregistrée à une fête du nouvel an (sympa comme animation, au lieu d'avoir un blaireau style DJ Jean-Luc, ou MC René qui va te faire chier toute la soirée à reprendre La danse des canards, tu fais venir Tool chez toi.)
Enfin, afin de clôturer cette première entrée, la chanson-titre, "Opiate", pose un peu plus les choses, en dénonçant les méfaits de la religion au sens d'une croyance irraisonnée et utilisée par certains comme domination sur d'autres (le titre étant la référence direct à l'opium des masses dénoncé par Marx) le tout très simplement ("You are broken now but faith can heal you. Just do everything I tell you to do…Deaf and blind and dumb and born to follow.."). Et c'est d'autant plus fort que la dénonciation ne se fait pas en s'arrachant le fond des cordes vocales comme la plupart des groupes de death anti-religion, mais bien avec une chant clair puissant, poussant vers le cri sur la fin. Et puis la connerie de fin avec une quasi-parodie de rock psychédélique, je conseille de lire les paroles qui sont assez drôles sur des expériences sous acide, la plage en soi n'ayant pas vraiment d'intérêt.
Bref ce disque offre une perspective sur tous les aspects déjà présents qui allaient faire l'intérêt de ce groupe, bien que les paroles soient plus revendicatives, et plus directes qu'elles ne le seraient plus tard. En effet le "Time has come to pay" sur "Know Your Enemy" de RATM, ça vous dis rien ? Et si, c'est lui-même, MJK en personne qui était venu pousser son petit cri sur le premier album de leurs potes. Déjà en 92, que de souvenirs, j'avais déjà la gueule décalquée de pustules acnéiques et des pollutions nocturnes où je refaisais les cartes d'Europe sur mes draps.
Donc un EP que je l'aime pour ça concision, sa justesse de ton, sa brutalité douceâtre et acre, un son tout à fait correct sans être extraordinaire, mais très dynamique. Je le conseillerais éventuellement à ceux que Tool emmerde même si je peux avoir du mal à concevoir cela.
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