Entre Gorod et Thrashocore c'est une belle histoire d'amour – platonique, on vous rassure – commencée avec la découverte par Niktareum de
Leading Vision (il a mis du temps le pleutre), perpétrée avec le lobby excessif du regretté lapin jaune (qui malgré son grand âge n'est pas décédé mais est parti pour un monde meilleur) bien aidé par toute une rédaction ultra-enthousiaste à l'écoute de leur petit chef d'œuvre qu'est
Process Of A New Decline. Il faut dire que Gorod est un groupe comme on en voit peu en France puisqu'il pratique un death metal de qualité là où la norme semble être à celui qui fera les pig squeals le plus bas et la mosh part la plus longue. Oui, comptez bien, ça fait déjà peu de monde. Alors quand on sait qu'en plus ils versent dans le death technique avec un style qui leur est propre, groovy mais pas chiant et encore moins avare en mélodies, on ne peut que goûter la chance d'avoir un pareil talent dans l'hexagone. Qu'elle semble lointaine aujourd'hui l'époque où Gorod n'était qu'un Gorgasm parmi d'autres, surtout quand on sait que leurs albums sont les produits les plus exportés du bordelais aux États Unis après le gros rouge qui tache. Pourtant ce petit EP nommé
Transcendence est l'occasion de faire un petit tour dans le passé du groupe et clôt d'une fort belle manière une page de son histoire.
Car il faut le souligner, il n'y a que le titre éponyme qui soit véritablement une nouveauté sur cet EP, les quatre premiers morceaux ne sont en effet que des reprises : « Earth Pus » figurant sur
Neurotripsicks, « Blackout » sur
Leading Vision, et « Textures » sur l'inégalable
Focus. La nouvelle version de « Earth Pus », qui ouvre
Transcendence n'est qu'une version améliorée de l'originale semblable à celle que Gorod joue en live, avec les parties de batterie de Sam et sans le final un peu longuet de l'album. Les deux reprises acoustiques font l'originalité et une grande partie de l'intérêt de
Transcendence tant elles transforment les originaux sans en perdre l'énergie ou la qualité rythmique tout en les transposant dans un univers plus apaisé où les mélodies complexes acquièrent toute leur pertinence. C'est particulièrement vrai pour « Earth Pus : Salvation » dont on reconnaît à peine les traits au premier abord et qui foisonne désormais de détails et d'arrangements avec divers instruments qui font de ce titre un bijou valant à lui seul l'achat de cet EP. Il faut également saluer la reprise de « Textures » de Cynic qui, même s'il elle n'atteint évidemment pas la qualité de l'original – hé, on parle de Cynic là – en particulier à cause d'une production étrangement brouillonne par rapport au reste de l'album, demeure en soi une petite prouesse technique. C'est très fidèle à la version floridienne, sauf au niveau de la batterie et surtout de la basse qui prennent quelques libertés de temps en temps, mais personne ne s'en plaindra vu qu'il aurait été idiot de défigurer ce monument qui tient autant du jazz fusion Holdsworthien que du techno-death. À moins que vous ne soyez du genre à penser que la Joconde à moustache sublime l'originale grâce à la puissance évocatrice de sa pilosité faciale est-allemande, bande de bobos dégénérés.
Bref ce qu'il y a de moins satisfaisant sur cet EP demeure sans doute ce que l'on attendait le plus, ce fameux morceau fleuve d'un quart d'heure dont j'entends parler depuis maintenant plus d'un an. Pourtant loin de moi l'idée de cracher dans la soupe puisque « Transcendence » est assurément un très bon titre, il aurait simplement pu être excellent sans quelques détails qui viennent, en ce qui me concerne, refroidir mon enthousiasme. Il faut savoir que c'est le premier titre où le nouveau vocaliste du groupe fait son apparition, lui qui provient de Zubrowska et qui est la principale des (nombreuses) raisons pour laquelle je n'ai jamais pu supporter ce groupe. Alors certes son chant clair au début du titre – bien qu'il m'en touche une sans faire bouger l'autre – n'est pas réellement désagréable, mais si la voix horrible de 1:30 à 1:40, juste avant que Guillaume reprenne ses droits, est bien de son fait, alors l'histoire d'amour que j'entretiens avec Gorod risque bien de se finir en engueulade à coup de vaisselle brisée et de bouteilles de vodka balancées par la fenêtre pour peu que cette tessiture vocale devienne récurrente. D'un point de vue plus instrumental, un début tranquille vient nous plonger dans une légère torpeur avant que le titre ne démarre vraiment à la fin de la cinquième minute et ne prenne son envol avec une ligne de tapping qui retrouve les standards d'excellence du précédent album, passage d'ailleurs sublimé par l'alternance entre Guillaume et Ross Dolan de Immolation. Et que dire de cette sublime transition au groove et aux mélodies soutenues par le chant clair très prog et parfaitement adapté de Mathieu, qui devrait d'ailleurs songer à réitérer l'expérience ? Voilà le niveau d'excellence que j'attendais de la part de Gorod. Dommage que le titre retombe comme un soufflet trop cuit dès la neuvième minute, ce qui coïncide d'ailleurs étrangement avec le retour des vocaux disgracieux vers 9:40. Malgré quelques bons riffs on ne retrouvera jamais la grâce de ces quelques minutes dans le dernier gros tiers du morceau, et une ligne de guitare acoustique un peu timide et assez abruptement achevée finira de laisser un sentiment étrange, entre expérimentations vocales malheureuses et structure définitivement trop sage, loin du côté épique d'un « The Path ». Il y avait la place pour faire non pas forcément plus ambitieux, mais surtout plus percutant.
Gorod demeure encore un groupe incontournable du paysage metallique français et file droit malgré quelques critiques étranges pour ne pas dire saugrenues (des vocaux death metal sur du death metal, c'est vrai que ça a de quoi en dérouter plus d'un). Malgré un deal avec Listenable Records pour leurs précédents albums, cette nouvelle œuvre des bordelais est autoproduite car aucun label ne semble avoir voulu prendre le risque de le sortir. C'est sans conséquence sur la qualité de l'EP puisque la production a été assurée avec brio par Mathieu, qui s'en est admirablement bien tiré. Par contre, c'est au niveau de la distribution que cela pêche et il vous faudra vous le procurer auprès du groupe si vous voulez avoir la chance de l'écouter, ce que je ne saurais que trop vous conseiller si jamais vous aimez le death metal riche et inventif, et si vous êtes curieux d'entendre ces deux excellentes reprises acoustiques.
Transcendence est très certainement le point de pivot de la carrière de Gorod, transition entre un passé glorieux et un futur qui possèdera sans doute une identité sonore différente. Pour ma part je regrette d'ores et déjà les départs de Arnaud et surtout de Guillaume, et j'espère plus que vivement que Julien adaptera ses vocaux au style de Gorod, sans quoi je ferai également partie des idiots qui voudront voir le groupe virer au tout instrumental.
6 COMMENTAIRE(S)
10/06/2012 10:51
Ce morceau est superbe c'est clair. Je trouve même qu'il fait de l'ombre au dernier album.
30/10/2011 18:01
08/08/2011 19:21
08/08/2011 17:53
08/08/2011 17:50
Bon, qq grossières erreurs quand même: 1) Gorod
n'a jamais été un Gorgasm parmi d'autres, non mais
c'est quoi ce crime lèse-majesté ????
2) "aux mélodies soutenues par un le chant clair "
est la une erreur d'étourderie ou bien tu te je me
trompe ?!#
Bon, et toi Nikta, t'en penses quoi ?
08/08/2011 17:43