Je dois bien l'avouer, mon intérêt pour Blut Aus Nord ne remonte qu'à quelques mois seulement. Bien qu'en possession de l'album
The Work Which Transforms God depuis sa sortie, je n'avais pas vraiment eu le courage de porter mes oreilles sur leur musique. La faute à qui? A quoi? Probablement à un peu de fainéantise et surtout à la peur de devoir me farcir du Black Metal industriel qui est un genre que je n'affectionne pas particulièrement. Et puis
777 - Sect(s) est sorti et a fini par bousculer la donne. Pourtant, sur cet album (et au sein de cette trilogie) Vindsval ne fait pas un secret de son intérêt pour la musique industrielle et ses ambiances froides et déshumanisées. Mais je ne sais pas, j'y ai tout de suite trouvé mon compte. Depuis j'ai porté mes oreilles sur d'autres albums du groupe dont le superbe
Memoria Vetusta II et je dois bien reconnaitre que je m'en veux d'avoir occulter Blut Aus Nord aussi longtemps.
En attendant la sortie du troisième volet de cette fameuse trilogie intitulé
777 - Cosmosophy, revenons sur le EP
What Once Was... Liber I sorti initialement en 2010. Depuis longtemps épuisé, ce disque vient d'être réédité par Debemur Morti afin d'accompagner la sortie du deuxième volet intitulé à juste titre
What Once Was... Liber II. Cette réédition revisitée en surface bénéficie d'un nouvel artwork commun aux deux volumes. Ces derniers sont donc présentés dans une édition gatefold LP 12" habillée d'une matière rigide plus ou moins similaire à du cuir et frappée par de chouettes représentations occultes dorées. De beaux objets qu'on prend plaisir à regarder avant même d'en écouter une seule note. En terme de contenu, ces deux EPs sont également assez proches puisqu'on y trouve un titre par face pour une durée moyenne d'environ trente minutes par disque.
Chronologiquement, ce premier volet prend place juste après la sortie de l'album
Memoria Vetusta II: Dialogue With The Stars. Un album de Black Metal plutôt traditionnel qui marquait un retour aux sources pour le groupe Français après quelques albums sortant clairement des sentiers battus (
The Work Which Transforms God,
MoRT ou encore
Odinist - The Destruction Of Reason By Illumination).
What Once Was... Liber I revient également sur ce Black Metal primaire et bestial mais qui pourtant n'en oublie pas d'être lumineux et comme le disait déjà mon collègue Ikea, esthétique. Ce EP doit-il alors est considéré comme une fenêtre sur un passé révolu? What Once Was, Ce qui était n'est plus... Peut-être bien, surtout si l'on considère la fameuse trilogie qui lui fait suite.
Face A, on trouve donc le titre "I" qui s'étale sur plus de seize minutes. Le morceau débute par une courte introduction jouée sur un instrument me faisant penser à un orgue. Deux notes graves répétées de façon systématique et crescendo. Une entrée en matière hypnotique et sournoise qui s'efface rapidement pour laisser les guitares et la batterie s'engouffrer dans la brèche avec une virulence extrême. La batterie, hyper synthétique mais légèrement en retrait, frappe sans cesse alors que les riffs suivent un rythme d'enfer. Blut Aus Nord n'a jamais été aussi primaire et le chant de Vindsval s'inscrit lui aussi dans cette logique. Possédé et gorgé de haine, une voix défaite et complètement à l'arraché... Ambiance. Le groupe tient bon la cadence avant de casser le rythme vers 2:40 et de revenir avec de somptueuses harmonies lumineuses dont lui seul à le secret (
777 - Sect(s),
777 - The Desantification etc...). Un puits de lumière éphémère dans l'obscurité la plus totale. Blut Aus Nord repars ensuite de plus belle, jouant avec les ambiances, cassant les rythmes, faisant évoluer son morceau au fil de riffs tous différents, jamais identiques. Puis arrive la cassure. Une nette séparation à 9:00 où les instruments se font silencieux au profit de voix sifflantes et mystérieuses tapis dans l'ombre. Que ce passe t'il? On ne le sait pas vraiment mais peu importe car cette accalmie est de courte durée et l'assaut reprend de plus belle sur la base de nouveaux riffs et de nouvelles harmonies toujours aussi envoutantes. Quel plaisir de voir un groupe se donner autant de peine dans la composition et dans la mise en place de ses atmosphères. Si la cohérence globale peut sembler discutable, elle poursuit pourtant un but, celui de surprendre, d'être là où on n'attend pas le groupe et force est de constater que ça fonctionne. Et alors qu'on croit le groupe lancé pour son sprint final, voilà qu'une seconde cassure franche intervient à 12:35. Une cassure toujours de courte durée qui offre à Blut Aus Nord la possibilité de terminer ce "titre" comme il l'a commencé, d'une façon lumineuse et pourtant si terrible.
Face B, on trouve donc le titre II qui s'étale quant à lui sur plus de quinze minutes. Loin de démarrer en trombe, Vindsval et ses acolytes optent ici pour des rythmes plus lourds à l'atmosphère guerrière (me rappelant un peu ces atmosphères antiques comme Nile a su les retranscrire) avant de s'orienter vers des sonorités assez identiques à celles qu'on peut trouver chez certains groupes de Death Metal comme Antediluvian ou Mitochondrion. Soit une musique boueuse et organique qui a tendance à noyer rapidement l'auditeur dans un chaos sonore quasi cacophonique. Blut Aus Nord se joue ainsi allégrement des étiquettes, faisant références aussi bien au Death Metal qu'au Black Metal voir même au Doom. Quelle classe. Cette face B se veut identique à la face A dans sa construction. Ainsi, ce titre "II" est lui aussi composé de trois parties. Après donc un premier tiers plus écrasant que jamais, Blut Aus Nord reconduit son assaut avec un Black Metal toujours aussi primaire et basique, du moins en apparence. Mais à la différence des trois pièces qui composent le premier titre, on retrouve finalement très peu de ces harmonies lumineuses. Blut Aus Nord, après nous avoir assommé nous laisse finalement choir dans l'obscurité la plus totale. Difficile de hisser la tête hors de l'eau, même lorsque quelques réminiscences de ces riffs lumineux semblent pointer à l'horizon (9:42). Finalement il n'en est rien et le groupe termine le dernier tiers toujours de façon aussi radicale.
Comme évoqué un peu plus haut, difficile de cerner toute la cohérence derrière ce
What Once Was... Liber I. Deux titres, un par face mais finalement chacun de ces deux titres est lui même décomposé en trois parties bien distinctes. Je ne sais pas s'il faut appréhender chaque titre, "I" et "II", comme un tout indissociable de ses trois parties ou bien les considérer comme des entités propres. Je ne sais pas... Par contre, difficile de ne pas se rendre compte que Blut Aus Nord est un groupe définitivement à part et dont la qualité des compositions est difficilement critiquable. Derrière ce côté primaire et bestial qui pourrait semblé daté et obsolète, Blut Aus Nord réussit pourtant à produire une musique d'une extrême modernité en y associant une production étouffante et surtout déshumanisée. En cela, cette batterie pourrait presque paraître artificielle alors qu'il n'en est rien. Idem, comment ne pas évoquer le son abrasif des guitares qui pourtant ni lourd, ni puissant réussi à vous rendre complètement fou. Et finalement ce mixage, avec les guitares et la voix en avant, la batterie et la basse en arrière plan. Il y a quelque chose de sournois là dedans. Voix et guitares nous aguichent, nous harcèlent alors que basse et batterie nous rendent complètement dépendants et aliénés à cette musique incroyable. Quelle voyage!
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