Je ne suis qu'en pointillé l'actualité des jeux vidéos (mon ordinateur ne parvenant qu'à faire tourner des productions rétros, à mon grand dam) mais j'ai été soufflé par le nouveau
Doom, que j'ai pu essayer chez un ami. Dans cette mode des reboots / remakes / suites-de-vieilles-licences / l'imagination-est-morte, Id Software a vraiment impressionné tout le monde avec ce FPS ultra-rapide et hargneux, reprenant les décors infernaux et martiens du premier volet avec les moyens d'aujourd'hui. Je m'en suis rapidement rendu compte, soufflé par la violence des affrontements avec des hordes de monstres arrivant par vagues, électrisé par la puissance de mes armes ou encore ce coup de génie que sont les « glory kills », ces écrasements de crânes ou vertèbres donnant une seconde pour souffler et récupérer des points de vie qui, mon dieu, descendent très très vite (l'ami en question avait eu la « gentillesse » de choisir la difficulté « ultra-violence »). Gore, brutal, mais aussi épique quand, au bord de la mort, Doom Guy (héros du jeu dont la personnalité n'est faite que de muscles gonflés et craquements de doigts avant d'aller au combat) détruit à mains nues ses ennemis dans l'espoir de se nourrir un peu, j'ai retrouvé dans ce blockbuster des sensations que j'avais eu à l'époque de
Quake,
Serious Sam et consorts, tout en étant abasourdi par l’extrémisme de la démarche visant à acculer le joueur de bêtes hideuses demandant rapidité et précision pour sortir vivant de la mêlée.
De cette expérience, je garde surtout le souvenir d'un moment aussi éprouvant que jouissif, ainsi qu'une atmosphère baveuse et pourtant désertique, où les batailles faites souvent chair contre chair prennent des proportions homériques. En résumé,
Doom est ultrametal, iconique dans les émotions qu'il offre tout en renouvelant le genre par sa nervosité excessive. Mais si je vous parle en long et large de lui, ce n'est pas que pour transmettre la joie que j'ai ressenti en le parcourant :
Shrines of Paralysis est pour moi exactement la mise en musique de ce jeu.
Je ne vais pas vous faire l'affront de vous présenter Ulcerate, ce groupe largement connu et que j'ai déjà abordé dans mes chroniques de
The Destroyers of All et
Vermis. Un dernier album qui m'avait par ailleurs énormément déçu, tombant dans une lecture en surface de ce style particulier entre technicité et atmosphère. Autant dire que je n'attendais rien de
Shrines of Paralysis, deuxième longue-durée sous la bannière de Relapse Records. La surprise n'en a été que plus grande : les Néo-zélandais sont de retour et nous offrent ici ce qu'on était en droit d'attendre d'eux après
The Destroyers of All. Rien de moins !
Shrines of Paralysis est un monolithe. Un monolithe de douleur, de guerre, de rouge, où tout sent la désolation et l'appel du sang. Dès « Abrogation », le mastodonte torturé de
The Destroyers of All se réveille de son cercueil cryogénisé avec des pentagrammes, une arme et des zombies à la chair pantelante non loin – soit le début de
Doom (oui, ce jeu défonce). Ulcerate brise ses chaînes d'emblée, nous emmenant vers cinquante-sept minutes où chaque titre de morceau parait faire la course à celui qui sera le plus tueur et autoritaire. Une chose qui se retrouve dans les compositions : que ce soit durant « There Are No Saviours », « Yield to Naught », « End the Hope » et même le semi-interlude « Bow to Spite », l'impression d'avoir affaire avec ce qu'aurait dû être
Vermis (un album de transition quelque part, où la formation présentait ses armes avant des les utiliser à foison comme ici) finit par laisser place à une plongée totale dans cette œuvre qui, de nouveau, pose la bande de Jamie Saint Merat – qui souffle ici par un jeu plus impitoyable qu'autrefois tout en laissant sa finesse habituelle s'exprimer – comme unique en son genre, mettant sous sa botte les autres prétendants à un death metal ambiancé.
Derrière une production impeccable, lisible, puissante, plaçant enfin la batterie suffisamment en avant pour l'apprécier pleinement, tout le monde se montre à la hauteur, à l'image de ce chant se faisant plus contrasté qu'autrefois (les hurlements sauvages sur « Extinguished Light » par exemple). Même les passages aériens, typiques de la formation, ont été convertis à cette fièvre de chaque instant, ne baissant jamais la tension mise en place par les moments brutaux. Non, pris dans cette même folie carnassière, ils donnent une aura encore plus fatidique à cette entreprise meurtrie et meurtrière, comme si l'envie de massacre se faisait au détriment de son propre corps. Un corps maltraité, poussé dans ses derniers retranchements où la rage guide chaque cellule.
Shrines of Paralysis est indubitablement un album épique où Ulcerate plonge sans cesse dans l'excès avec bonheur, mais également une œuvre tragique où le couperet fait de plus en plus sentir sa lame froide sous l'arrivée constante de nouvelles menaces malgré une incessante pluie de balles (« End the Hope » : avec un titre comme celui-ci, y a-t-il besoin d'autres explications ?).
J'imagine que, étant donné le style pratiqué, je devrais signaler que
Shrines of Paralysis est épuisant. Hé bien non, même pas, tant Ulcerate transmet ici son plaisir concupiscent – qui définit toujours aussi bien le death metal – mieux que n'importe quel groupe frontal ou s'arrêtant à la technique pour épater. Quelque part, les Néo-zélandais ont créé ici leur album définitif (un constat tout de même à pondérer en raison de quelques légers moments de flottement tels que le début de « Chasm of Fire »), donnant à la noirceur opaque et écarlate de
The Destroyers of All une majesté qui pousse à se fatiguer la cervelle malgré un Game Over devinable dès le départ. Aller, encore une partie et promis, j'arrête.
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo
Par Jean-Clint
Par Troll Traya
Par alexwilson
Par Sosthène