J'ai beau être un fan de longue date du combo canadien, je n'attendais pas grand-chose de la nouvelle livraison d'un ANNIHILATOR qu'on avait quitté en assez mauvais termes après un
« Metal » en forme de pétard mouillé, affligé de caméos aussi prestigieux qu'inutiles mais surtout plombé par des compos indignes du talent de son maître à riffer, l'increvable Jeff Waters. Un Jeff Waters moins isolé qu'à l'accoutumée puisque qu'avec désormais quatre albums successifs au compteur, Dave Padden s'impose doucement mais sûrement comme le frontman idoine pour un groupe en quête perpétuelle de stabilité. Une chance que ne connaîtra pas Mike Mangini, remplacé au bout de trois piges (tout de même !) par Ryan Ahoff (THE WATCHMEN), ANNIHILATOR ayant dans l'intervalle rejoint l'écurie anglaise Earache.
Cet album éponyme, au-delà d'une révolution de palais ou d'un retour aux sources que l'on n'ose même plus espérer après 25 ans de carrière, est surtout l'occasion pour le duo de faire perdurer un style dont l'excellent
« All For You » avait jeté les bases dès 2004, à savoir un thrash débridé conservant la trademark originelle (un heavy thrash à la fois véloce, alambiqué et virtuose) tout en poussant à son paroxysme les éléments à priori antagonistes de l'univers musical de Waters. Plus mélodiques mais également plus brutales –
réécouter les vieux albums pour s'en convaincre, on est loin du heavy gentillet de « Set The World On Fire » ! – les productions récentes du groupes, à l'exception d'un
« Metal » trop mou du genou pour séduire, contiennent toutes un ou deux titres vraiment rapides voire bourrins, à l'image d'un début d'album ici à forte dominante thrash metal. Car si la très complète « The Trend » propose des guitares lead chantantes et cajoleuses sur fond de recyclage de riff période
« Criteria For A Black Widow » dans ses premières mesures (Jeff a déterré celui de « Back To The Palace » pour l'occasion), le rythme s'intensifie dès 1 :41 pour ce qui restera la seule pièce instrumentale d'envergure sur cet album éponyme. Sorte de mid/fast tempo reflétant toutes les facettes de jeu d'ANNIHILATOR, « The Trend » est à l'image de ce treizième full length : solide et efficace. Pas aussi définitive que « Clown Parade » qui ouvrait la galette précédente mais les neuf titres suivants étant d'une bien meilleure tenue que les « Operation Annihilation » et autres « Downright Dominate », on ne se plaindra pas du retour aux sources speed imprimé sur « Coward » et « Ambush », premier titre depuis longtemps à envoyer la sauce trois minutes durant sans que Jeff ne casse l'ambiance à grand renfort de breaks mélo pas toujours indispensables (depuis « Human Remains » sur …
« Remains », pour tout dire). De thrash
off the limit et joué jusqu'à ce que mort s'en suive, il est aussi question sur le break couillu de « 25 Seconds », « Death In Your Eyes » ou encore « Payback » -
quelle épreuve de force à compter de 2 :18 ! - , preuve s'il en est que le groupe a tenu à rassurer la frange la plus extrême de sa fan base en caviardant « Annihilator » de solis et de riffs killers.
Ce démarrage pied au plancher assez inhabituel chez ANNIHILATOR (même le pourtant bien pêchu
« Schizo Deluxe » ne bourrait pas autant) n'empêche pas Waters de rééquilibrer les débats en proposant des titres tour à tour power (« Betrayed », qui aurait relevé le niveau en la matière sur
« Metal »), thrash n' roll (la réjouissante « The Other Side », très MEGADETH dans l'esprit et l'interprétation) ou mélodique, le superbe refrain émo de « Nowhere To Go » étant ce qu'on peut trouver de plus proche de celui, également magnifique, de
« Carnival Diablos ». Un retour aux affaires brutales qui profite également à Dave Padden, impeccable ici et signataire de quelques screams bien sentis qui font relèguent sa pâle prestation sur
« Metal » aux oubliettes. Quoique dans la droite lignée de
« All For You » et surtout
« Schizo Deluxe », « Annihilator » réserve malgré tout quelques surprises comme ces blasts inattendus sur « Death In Your Eyes » -
par ailleurs le titre le plus quelconque de l'album – ou la tonalité jazzy de l'atypique « 25 Seconds » qui reprend à son compte quelques idées vendangées sur la lourdingue et lointaine
« Criteria For A Black Widow » avant de tout donner le temps de deux minutes de fulgurances. Comme Waters n'oublie jamais de payer son tribut aux légendes heavy rock de sa jeunesse, on achève ce retour en territoire thrash mélo par une bonne vieille reprise de VAN HALEN (« Romeo Delight », extraite de « Women And Children First ») qui sonne autrement mieux que la récente cover toute pourrie de « On Fire » par SIX FEET UNDER. Au rayon griefs, au-delà du fait que ce disque ne recèle aucun classique absolu mais plutôt une somme de très bons titres, on regrettera une fois de plus que Jeff Waters fasse sonner son nouveau batteur comme une boîte à rythme, ce qui s'avère particulièrement irritant sur les nombreux passages rapides, et son habituelle propension au recyclage de plans (ce n'est pas le riff de « Hunter/Killer » que l'on entend sur « Coward » ?), encore que cette réserve ne concerne que les fans hardcore connaissant le groupe jusqu'au bout des ongles. Les auditeurs occasionnels n'y verront que du feu et se laisseront sans doute séduire par ce (très) bon album de thrash qui, classiques mis à part, est à ranger dans la première partie de tableau de leur féconde carrière, quelque part entre
« Carnival Diablos » et
« Schizo Deluxe ».
5 COMMENTAIRE(S)
12/10/2013 18:53
08/02/2011 08:58
21/05/2010 11:41
Je plussoie !!
20/05/2010 15:45
En effet, merci Nico! C'est un bon album pour remettre le pied à l'étrier, ça bourre bien, c'est thrash, pas de titres faibles. Je te le recommande avec "All For You", "Schizo Deluxe" et "Carnival Diablos" qui est un peu plus vieux.
20/05/2010 10:35
Sinon je pense que tu as oublié un "la" dans "est à ranger dans première partie de tableau".